À l’initiative du Groupe de La Haye, un « sommet d’urgence » se tient ce 15 juillet à Bogota en Colombie pour déclarer des « mesures concrètes » et tenter de mettre fin au drame qui se déroule dans l’enclave palestinienne depuis octobre 2023. Une trentaine de pays issus de tous les continents y participent.
Alors que les négociations indirectes piétinent entre Israël et le Hamas sur un cessez-le-feu dans le territoire palestinien dévasté par 21 mois de guerre, que les diplomaties occidentales demeurent plus que timorées vis-à-vis d’Israël quant au non-respect du droit international et humanitaire, le Groupe de La Haye entend porter sa voix et dépasser le cap des paroles en passant aux actes. Il organise une conférence historique à laquelle participent plus de trente États issus des quatre coins du globe.
La barre des 58 000 morts a été franchie dans la bande de Gaza, en majorité des femmes et des enfants. Une dévastation qui met chaque jour un peu plus en exergue l’échec des cadres juridiques internationaux à protéger les civils. « Face à ce constat, plusieurs nations ont pensé que ce serait une bonne idée de réunir un groupe d’États pour essayer non pas de créer du nouveau droit international qui existe déjà, non pas pour exhorter, pour appeler à, pour condamner, mais pour appliquer des mesures concrètes de la part des États, c’est à dire des politiques concrètes, de façon collective et coordonnée, pour mettre fin au carnage, pour mettre fin au génocide. Quand sur des sujets précis, les États s’unissent et lèvent leurs voix, ils ont plus de poids et d’influence que lorsqu’ils sont isolés », explique Guillaume Long, conseiller diplomatique principal du Groupe de La Haye.



« Si la Palestine meurt, l’humanité meurt »
Jusqu’à présent, des actions contre l’impunité des exactions israéliennes ont été menées de manière individuelle : l’Afrique du Sud a saisi la Cour internationale de justice pour violation présumée de la Convention sur le génocide de 1948, rejointe par d’autres États, des navires chargés d’armes en direction de l’État hébreu ont été bloqués par la Namibie et la Malaisie.
En mai 2024, la Colombie a rompu ses relations diplomatiques avec Tel-Aviv. Une décision prise « pour cause de gouvernement, de président génocidaire, avait alors lancé le président Gustavo Petro. On ne peut accepter le retour des époques de génocide, d’extermination d’un peuple entier devant nos yeux, devant notre passivité. Si la Palestine meurt, l’humanité meurt. On ne laissera pas mourir la Palestine, tout comme on ne laissera pas mourir l’humanité. » La Colombie qui, comme le Brésil, soutient la procédure historique intentée par Prétoria contre Israël devant la CIJ.
L’union faisant la force, selon l’adage, le 31 janvier 2025, à La Haye aux Pays-Bas, siège des principales juridictions internationales, neuf pays se mobilisent avec pour objectif de responsabiliser Israël sous le droit international. *« L’esprit principal du groupe de La Haye est une réponse internationale face à la frustration que ressentent beaucoup d’individus mais aussi de diplomates avec le fait que le droit international, aujourd’hui, n’est pas appliqué, alors qu’il est plutôt fort en ce qui concerne la Palestine.
Le premier “cri” du Groupe de La Haye est vraiment une défense du droit international, pointe Guillaume Long. C’était vraiment : “Voilà, nous sommes des pays très lointains [l’initiative revient à l’Afrique du Sud pour l’Afrique, la Malaisie pour l’Asie et la Colombie pour l’Amérique latine] et pourtant, nous n’acceptons pas ce génocide. Nous n’acceptons pas cette absence d’action de la part des États qui pourtant ont des obligations juridiques et qui ne les appliquent pas. Donc, cela a vraiment été la logique, tout simplement une logique de défense du multilatéralisme. »
« Le peuple palestinien mérite justice. L’heure est grave »
« En coupant les ponts entre nos tribunaux, nos ports et nos usines, nous pouvons remettre en question la vision de Donald Trump et Netanyahu d’un monde où “la force prime sur le droit”, estime le président colombien dans les colonnes de The Guardian. Le choix qui s’offre à nous est difficile et impitoyable. Soit, nous défendons fermement les principes juridiques qui visent à prévenir la guerre et les conflits, soit nous assistons, impuissants, à l’effondrement du système international sous le poids d’une politique de puissance incontrôlée. Soyons des acteurs ensemble, et non des suppliants isolés (…) Le peuple palestinien mérite justice. L’heure est grave. L’histoire nous jugera sévèrement si nous ne répondons pas à son appel. »
Depuis plus de 600 jours, 2,3 millions de Palestiniens survivent dans l’enclave désormais affamée et ravagée de la bande de Gaza. La Conférence internationale pour le règlement pacifique de la question palestinienne, co-présidée par la France et l’Arabie saoudite, proposée par l’ONU, a été reportée sine die. Ce 15 juillet à Bruxelles a lieu la réunion des ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne durant laquelle sera discuté l’article 2 de l’accord d’association entre l’UE et Israël. Dans le même temps, à Bogota, se tient la conférence d’urgence pour Gaza, une opportunité unique pour sauver le droit international.