Préférant s’adresser à Fox News qu’à la presse de son pays, Benjamin Netanyahou avait annoncé jeudi son plan avant de le soumettre à ses ministres : « Nous voulons nous libérer nous-mêmes et libérer la population de Gaza de l’horrible terreur du Hamas ». Il aura fallu dix heures de débats pour les convaincre d’envoyer l’armée prendre le contrôle de Gaza ville et de toute l’enclave. Ce qui montre bien la division croissante des Israéliens.
Immédiatement, le Forum des familles, principale organisation des proches d’otages israéliens, a déclaré que la décision du cabinet «signifie abandonner les otages » et le chef de l’opposition, Yaïr Lapid, a déploré sur X « une catastrophe qui va entraîner beaucoup d’autres catastrophes, amener «la mort des otages, celle de nombreux soldats, coûter des dizaines de milliards aux contribuables israéliens et (entraîner) une faillite diplomatique». Ce midi, à Jérusalem, des centaines de manifestants se sont rassemblés devant les bureaux du Premier ministre pour réclamer la fin de la guerre à Gaza. Pour eux, « Israël a perdu sa boussole morale ». Quelques manifestants évoquent, fait nouveau, le sort des « innocents de Gaza », ou dénoncent un génocide en cours. Mercredi, dix-neuf professeurs israéliens de droit international et de philosophie juridique avaient écrit à Netanyahou pour le prévenir que la poursuite de la guerre dans la bande de Gaza serait « illégale » et « peut même constituer un acte d’agression, engageant la responsabilité pénale personnelle des hauts responsables de l’Etat ».
De la Chine à l’Allemagne, de la Turquie ou l’Arabie Saoudite à la Grande Bretagne et à de nombreux autres pays, c’est la désapprobation et l’inquiétude. Le plan de Netanyahou ne peut conduire qu’à une guerre sans fin et gomme, une fois, de plus les droits des Palestiniens, la réalité de la Palestine. De plus, et le chef d’état-major Eyal Zamir, l’a dit en vain, il est irréalisable et dangereux. Le Hamas est affaibli mais peut mener une guérilla, des combats urbains meurtriers. Et contrairement à ce qu’attend Bibi, aucun pays arabe n’est d’accord pour gouverner l’enclave…
A Gaza, la peur et l’angoisse montent encore. Affaiblis par la faim, accablés par la soif, des centaines de milliers de Gazaouis vont devoir quitter leurs abris de fortune pour d’autres camps de déplacés. Combien mourront sur les chemins de l’exode ?
Le Premier ministre de l’Etat hébreu n’a écouté personne, sauf ses extrémistes. Il a pris une décision politique et idéologique qui sert avant tout ses obsessions et ses intérêts. Mais s’il a choisi la fuite en avant, Netanyahou avait forcément le feu vert de Donald Trump. Ceci explique cela.
Le « reste » du monde qui condamne va-t-il passer aux actes et sanctionner ? Dans son combat devenu absurde et insensé, Israël a un « atout » : la détestation du Hamas terroriste et islamiste qui ne représente pas les Palestiniens. Le monde, y compris les pays arabes, veut son désarmement, sa mise à l’écart. Ses dirigeants entendent conserver leur influence. Une équation de plus à résoudre. En 1941, le général de Gaulle, parlant de la campagne de Syrie, avait dit : « : «Vers l’Orient compliqué, je volais avec des idées simples». On n’en a toujours pas trouvé…