Depuis un quart de siècle, je porte la cause de la mémoire des Siciliens de Tunisie. Vingt-cinq années d’engagement acharné, non pas seulement pour narrer une histoire italienne au sens large, mais pour mettre en lumière un récit distinct, une identité singulière, une histoire à part, forgée au cœur même du creuset tunisien.
Mon combat a toujours été celui de la reconnaissance : identifier cette histoire, notre histoire, en tant que telle. Celle d’une communauté profondément enracinée, dont l’existence se confondait avec le tissu social tunisien. Une communauté qui partageait les mêmes quartiers, les mêmes métiers, les mêmes joies et les mêmes peines que ses voisins tunisiens. Cette proximité, cette connivence intime, méritait d’être reconnue pour ce qu’elle est : un héritage partagé, et non une simple parenthèse migratoire.
Vendredi 17 octobre 2025, à la Faculté des Sciences Juridiques, Politiques et Économiques, j’ai vécu l’instant que j’attendais depuis si longtemps. Un moment d’une intensité rare, qui a résonné comme l’aboutissement de toutes ces années de labeur.
Ce sont les jeunes étudiants tunisiens qui, prenant la parole, ont prononcé les mots libérateurs :
« Cette histoire, c’est celle de nos grands-parents, nos parents, c’est la nôtre, elle nous appartient ! »
Dans cette phrase s’est dissipée toute notion d’« autre » ou d’« étranger ». La mémoire des Siciliens de Tunisie n’était plus un objet d’étude extérieur, elle s’était fondue dans le grand récit national, revendiquée par la jeunesse qui bâtit l’avenir.
Leurs voix claires et affirmées ont sonné comme une reconnaissance officielle, morale et émotionnelle. L’histoire a été réintégrée là où elle avait toujours eu sa place : dans le patrimoine vivant de la Tunisie.
Après ces vingt-cinq années de lutte, je peux désormais l’affirmer avec une profonde émotion : le but a été atteint. La transmission est assurée. Le combat de la mémoire a trouvé sa plus belle des victoires.