Les Argentins renouvellent aujourd’hui la moitié de l’Assemblée nationale et un tiers du Sénat. Pour le président « à la tronçonneuse », Javier Milei, ces élections s’apparentent à un quitte ou double, à un référendum sur la politique libertarienne qu’il mène depuis son accession au pouvoir en décembre 2023. Il avait annoncé dix mois de sacrifices afin de redresser le pays ruiné par trop d’années de péronisme.
Incontestablement, il a réussi au plan macroéconomique : l’inflation est passée de 211% à 31,8% et baisse encore, la dette est descendue de 255% à 84% du PIB, la pauvreté a chuté de 58% à 31% Un premier excédent budgétaire a été dégagé l’an dernier. Cependant, le bilan social laisse à désirer : l’Argentine a perdu 16 322 entreprises et 236 139 emplois. 43,2 % des travailleurs argentins sont aujourd’hui informels, sans aucune couverture ni protection. C’est le taux le plus haut en dix-sept ans. Le coût de la vie a explosé et les salaires ont peu progressé, le revenu minimum est de 200 euros et 80 % des Argentins gagnent moins de 600 euros . Une tablette de chocolat de 100 grammes coûte l’équivalent de 34 dinars en pesos argentins, le litre de lait 4,10 et le ticket de bus 5,10…
Javier Milei, qui a toujours le soutien d’environ 42% de ses concitoyens, sait qu’il n’est pas au bout de son chemin libertarien. Il leur demande de tenir jusqu’à la prochaine élection présidentielle, qui aura lieu en 2027 : « Je te parle depuis le futur. L’Argentine est un pays meilleur. Il n’est pas parfait, mais il est différent… » dit-il dans son dernier clip de campagne.
Le but du libertarien n’est pas de devenir majoritaire à l’Assemblée et au Sénat, mais de passer de 37 à 86 députés -sur 257- et de 7 à 24 sénateurs -sur 72- ce qui lui assurerait un tiers des sièges, synonyme de pouvoir de blocage. En effet, les parlementaires peuvent surpasser un veto présidentiel en réunissant plus des deux tiers des voix…
Le pouvoir n’est pas assuré de cette petite victoire car en septembre, le candidat péroniste a reçu 47% des voix (contre 33% pour le parti de Milei) dans l’élection gubernatoriale de la province de Buenos Aires. Leader péroniste et gouverneur de la province, Axel Kicillof qualifie le président et sa gestion « de plus grande escroquerie de l’histoire argentine », faisant « s’effondrer le pays ».
De plus, des scandales de corruption, dont l’un impliquant Karina Milei, sœur du président et cheffe de son parti « la libertad avanza » (la liberté avance) et la démission de José Luis Espert, tête de liste du parti dans la province de Buenos Aires, accusé de liens avec le narcotrafic, a choqué une partie de l’électorat.
Ces déboires ont fait plonger le peso, obligeant la banque centrale argentine a épuisé ses réserves en dollars, ce qui handicape le pays qui doit procéder l’an prochain à des remboursements de sa dette. L’Argentine est le plus grand débiteur du FMI avec 57 milliards de dollars.
Milei peut compter sur le soutien de son ami Trump qui lui a fait miroiter un plan d’aide allant jusqu’à 40 milliards. A condition de réduire la présence et l’influence de la Chine, de favoriser l’installation des entreprises américaines et leur accès à l’uranium. Le président américain, avec sa « franchise » habituelle a ajouté : : « S’il perd, nous n’allons pas être généreux avec l’Argentine […], nous n’allons pas perdre notre temps ».
Le pire pour Milei serait donc que les péronistes obtiennent la majorité absolue à l’Assemblée. Improbable mais pas exclu.