Le conseiller général en communication et orientation au ministère de l’Éducation, Moncef Khemiri, a révélé que le pourcentage d’élèves orientés vers la filière des mathématiques après la deuxième année de l’enseignement secondaire ne dépasse actuellement pas 7%, alors qu’il avoisinait les 20% il y a environ 25 ans.
Dans une déclaration à l’Agence Tunis Afrique Presse (TAP), ce jeudi, en marge du colloque de clôture du projet « Partenariats actifs pour une recherche participative sur l’éducation en Tunisie », Khemiri a indiqué que le désintérêt des élèves pour la filière mathématiques a eu un impact négatif sur le taux de réussite annuel au baccalauréat dans cette spécialité. Il a précisé qu’en 2024, environ 7 000 élèves seulement ont réussi le baccalauréat en mathématiques, contre quelque 30 000 dans la filière économie et gestion.
Il a affirmé que la filière mathématiques offre des opportunités de formation dans l’enseignement supérieur à forte rentabilité, notamment celles basées sur l’excellence et la performance académique. Selon lui, de nombreux élèves de cette spécialité sont admis dans des écoles et instituts prestigieux, comme l’Institut Pasteur à Marseille, certaines universités allemandes et françaises, ainsi que des institutions d’excellence en Tunisie, telles que les classes préparatoires.
Il a toutefois regretté le manque de candidats dans cette filière pour répondre aux besoins des autres établissements universitaires qui nécessitent ce type de compétences, que ce soit dans les domaines de la gestion, des sciences fondamentales ou de la technologie.
Raisons du désintérêt pour la filière mathématiques
Khemiri a expliqué que ce désintérêt est en grande partie dû à la faiblesse des acquis des élèves au niveau primaire, citant plusieurs études, dont un rapport de l’UNICEF de 2021 qui montre que 74 % des enfants tunisiens âgés de 7 à 14 ans souffrent de graves lacunes en calcul, contre 34 % ayant des difficultés en lecture et écriture.
Il a rappelé, à ce propos, que le projet « Partenariats actifs pour une recherche participative sur l’éducation en Tunisie », organisé pendant deux jours au Centre national de formation des formateurs et d’innovation pédagogique par les ministères de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur en partenariat avec l’Institut français de Tunisie, vise à traiter ce phénomène croissant de désintérêt des élèves tunisiens pour les filières scientifiques, en particulier celle des mathématiques, et à revoir les parcours de formation des enseignants.
Il a précisé que ces parcours étaient auparavant principalement destinés aux élèves des filières littéraires, mais que cela n’est plus viable aujourd’hui. Il a estimé qu’il est inacceptable de continuer à confier l’enseignement des mathématiques au primaire à des enseignants eux-mêmes faibles dans cette discipline.
Il a ajouté : « Il est nécessaire de changer d’approche, en orientant le plus grand nombre possible de bons élèves des filières scientifiques vers l’Institut supérieur de formation des enseignants, ce qui aura un impact positif sur leur formation et sur les résultats de l’enseignement aux premiers niveaux. »
Il a principalement recommandé de revoir le modèle de formation des enseignants, soulignant que les approches actuelles manquent d’interactivité et de lucidité, pourtant essentielles pour faciliter l’apprentissage des mathématiques et les rendre plus accessibles aux élèves.
Il a conclu que la Tunisie a besoin d’une politique nationale visant à réduire l’orientation excessive vers les filières littéraires et économiques, tout en signalant un fort déséquilibre régional. Il a noté, par exemple, que le gouvernorat de Sfax enregistre un taux de réussite élevé au baccalauréat grâce à une forte orientation vers les mathématiques.
Par ailleurs, il a reconnu que le ministère de l’Éducation doit mettre en place des programmes de soutien aux matières scientifiques dès le primaire, face à la domination des matières sociales au détriment des mathématiques.
Enfin, il a souligné que le problème ne se limite pas à la question de l’orientation, mais concerne également la perception sociale négative des mathématiques, ainsi que l’absence d’égalité des chances dans la formation précoce, ce qui explique l’attrait croissant pour la filière économie et gestion.