Dans la grisaille qui enveloppe la ville et la plonge dans une drôle d’ambiance triste et anxiogène, un beau feu d’artifices de couleurs est allumé depuis quelques jours dans les jardins de Salammbô. Plus précisément dans l’Espace Ain de l’artiste photographe Mohamed Ayeb où le peintre Bady Chouchen expose une trentaine de ses toiles
Dès que votre regard se pose sur les peintures de Chouchene, le souvenir vous ramène à la peinture de feu Mahmoud Sehili dont l’artiste a été l’élève et l’un des disciples les plus proches.
Comme Sehili, Chouchene peint par touches verticales, appuyées et nerveuses pour donner une impression de mouvement et de vie. Comme son maître disparu, il sait concilier formes couleurs et les disposer sur la toile pour réaliser un bel équilibre. Comme lui, il aime lui aussi cacher son jeu en n’imposant aucun point de vue au spectateur de ses tableaux, mais en le laissant scruter, à travers la matière peinte, le message délivré et dissimulé dans les scènes ordinaires de la vie, et qui prennent dans chaque tableau une dimension mystérieuse et magique.
Mais, différemment de son maître, Chouchene n’a pas de retenue pour les couleurs vives et éclatantes. Il y va sans hésitation pour un jaune ocre prolongé d’une touche rouge pour capter un rayon de soleil, ou un bleu éclatant qui donne à ses marines une impression dansante.
Bien sûr, le peintre sacrifie à quelques attentes manifestement commerciales en peignant la médina avec l’inévitable dame en safsari, mais l’essentiel de sa démarche picturale est ailleurs. Il est dans ce mouvement incessant de construction-démolition qui donne à ses peintures une impression de renaissance continue et un goût d’inachevé accompli, et cela toujours grâce à subtil recours au blanc exprimant dont on ne sait s’il marque le début de la peinture ou sa fin.
Courez vite voir cette belle exposition à l’Espace Ain-Jardins de Salammbô.
A.Messaoudi