La guerre ouverte aujourd’hui ou demain entre l’Inde et le Pakistan ? A New Delhi, le Premier ministre Modi a fait savoir hier à son armée qu’elle disposait de la « liberté opérationnelle » tandis qu’à Islamabad, le ministre de l’Information, Attaullah Tarar, indiquait que son pays dispose de renseignements crédibles selon lesquels l’Inde a l’intention de lancer une frappe militaire dans les prochaines 24 à 36 heures. Il prévenait que « « toute agression entraînera une riposte décisive ».
Pourquoi cette crainte, cette probabilité admise par les spécialistes de la région d’un nouveau conflit ? En raison d’un attentat commis le 22 avril dans la partie indienne du Cachemire, qui a causé la mort de 26 personnes. Il a été revendiqué dans un premier temps par le Front de la résistance (TRF), un mouvement issu du groupe jihadiste Lashkar-e-Taiba (« l’armée des pieux ») basé au Pakistan. L’organisation a déclaré ensuite que son compte avait été piraté, mais l’Inde impute à son voisin la responsabilité de cet attentat.
En signe de représailles, les deux pays ont fermé les frontières et leurs soldats, basés en nombre le long de la « Ligne de contrôle » (LoC) qui sépare le Cachemire en deux, échangent quotidiennement des tirs. Du côté pakistanais, un million et demi de Cachemiris vivant le long de la LoC se mettent à l’abri dans des bunkers ou autres abris de fortune construits lors des moments précédents de tension. L’Inde a également suspendu le traité des eaux de l’Indus, signé en 1960. Près de 80 % de l’agriculture pakistanaise dépend de cette eau de l’Indus, et on estime que 25 % du PIB pakistanais provient d’activités liées à ce fleuve. Tout détournement d’eau sera considéré comme un « acte de guerre » a prévenu Islamabad.
Gandhi avait prévu que le divorce difficile et sanglant de 1947 laisserait des traces durables entre les deux nouveaux pays créés en 1947 lors de l’indépendance arrachée à l’Empire britannique. Trois guerres ont déjà meurtri le Cachemire en 1965, 1971 et 1999.
Le conflit, s’il éclate, répondra en outre à des motifs intérieurs. Narendra Modi, qui avait révoqué le statut spécial du Jammu-et-Cachemire, se vante d’y avoir rétabli la stabilité et développé le tourisme. L‘attentat près de la cité touristique de Pahagalm, qui contredit ses dires, l’irrite au plus haut point et, certain de la supériorité militaire de son pays, il affiche sa volonté de « traquer les terroristes jusqu’aux confins du monde » et de donner une leçon à leur protecteur .
De son côté, l’armée pakistanaise semble tenté d’accroître son influence déjà grande dans un pays qui vit une crise politique et économique et où l’opinion publique est de plus en plus critique.
Si les ingrédients d’un nouveau conflit apparaissent donc réunis, les analystes ne voient pas une guerre prolongée mais plutôt une série d’escarmouches plus ou moins graves avant un retour au calme. Nul n’envisage un recours à l’arme nucléaire entre ces deux pays qui en sont dotés.
L’ONU, la Chine et les Etats-Unis ont appelé à la retenue mais, prédisent ces mêmes analystes, ils ne seraient guère écoutés en cette période où le rapport de force compte plus que le respect du droit international…