Des favelas de Rio de Janeiro ont connu mardi des scènes de guerre, avec la mort d’au moins 132 personnes dans l’opération policière la plus meurtrière de l’histoire de la ville brésilienne. Un précédent bilan faisait était de 64 morts. L’opération visait l’un des gangs de trafiquants de drogue du Brésil.
Les raids musclés des forces de l’ordre sont, malgré leur efficacité contestée, fréquents à Rio. Ils visent notamment les favelas, quartiers pauvres et densément peuplés, souvent sous le joug de trafiquants de drogue.
Mais l’opération de mardi, par son ampleur et sa violence, a créé un choc, jusqu’au haut-commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, qui s’est dit «horrifié» et a demandé des «enquêtes rapides». Le gouverneur de droite de l’Etat de Rio, Claudio Castro, a annoncé que «128 criminels» avaient été «neutralisés». Quatre policiers ont été également tués, a indiqué à l’AFP une source au sein de ses services.
Tirs intenses, barricades, incendies: l’opération, mobilisant 2500 agents, s’est concentrée sur deux ensembles de favelas du nord de Rio, Complexo da Penha et Complexo do Alemao, situées à proximité de l’aéroport international.





Jusqu’à présent, l’opération policière la plus meurtrière à Rio, ville de plus de 6 millions d’habitants, avait eu lieu durant la pandémie de Covid-19, en 2021, quand 28 personnes étaient mortes en une seule journée dans la favela de Jacarezinho. Le gouverneur a aussi annoncé l’arrestation mardi de «81 criminels», ainsi que la saisie de 75 fusils d’assaut et d' »une énorme quantité de drogue».
Les policiers ont mobilisé deux hélicoptères, 32 véhicules blindés et «douze véhicules de démolition» utilisés pour détruire des barricades. Le gouverneur Claudio Castro a publié sur X une vidéo d’un drone lançant un projectile depuis le ciel nuageux. «C’est comme cela que la police de Rio est reçue par les criminels: avec des bombes lancées par des drones», a commenté cet allié de l’ex-président d’extrême droite Jair Bolsonaro, dénonçant du «narcoterrorisme».
Permis de tuer
Des spécialistes et organisations de défense des droits fondamentaux critiquent la stratégie des forces de sécurité, la jugeant peu efficace contre les organisations criminelles. «Une opération policière qui entraîne la mort de plus de 60 habitants et policiers est une énorme tragédie», a déclaré César Munoz, directeur de l’ONG Human Rights Watch au Brésil.
Il a réclamé l’ouverture d’enquêtes sur chaque mort. «La politique de Claudio Castro traite les favelas comme des territoires ennemis, où règne le permis de tuer», a accusé le député de gauche Henrique Vieira.
La commission des droits de l’homme de l’assemblée législative de Rio a annoncé qu’elle exigerait «des explications sur les circonstances de l’action, qui a de nouveau transformé les favelas de Rio en un théâtre de guerre et de barbarie», selon Dani Monteiro, présidente de la commission. En 2024, environ 700 personnes sont mortes lors d’interventions des forces de l’ordre à Rio, soit presque deux par jour.
