Plusieurs ONG, dont la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et la Ligue des droits de l’Homme (LDH), ont annoncé avoir déposé plainte, à Paris mardi 1er juillet, contre deux soldats franco-israéliens, qu’elles accusent d' »exécutions sommaires » de civils dans la bande de Gaza.
« Cette plainte repose sur le travail d’investigation du journaliste palestinien indépendant Younis Tirawi, qui a enquêté sur une unité d’élite de l’armée israélienne, surnommée la Ghost Unit [l’armée fantôme, NDLR] », a expliqué à l’AFP Alexis Deswaef, avocat et vice-président de la FIDH.
« Il a réussi à interviewer le sergent-chef américano-israélien de cette unité de snipers qui explique, face caméra, comment ils tirent sur des civils gazaouis non armés aux abords de deux hôpitaux. C’est la définition même du crime de guerre », a-t-il affirmé.
« Ouvrir le feu sur toute personne en âge de servir dans l’armée »
Outre l’entretien avec le sergent-chef Daniel Raab, qui commente une vidéo tournée et publiée sur YouTube par un autre soldat, le reportage de Younis Tirwai, publié sur X le 4 octobre 2024, présente des vidéos sur le terrain, ainsi que des scènes filmées par des Palestiniens.
« Des éléments de preuve importants recueillis par les organisations plaignantes ont permis de corroborer les faits présentés dans le reportage », affirment les ONG dans leur communiqué.
La plainte avec constitution de partie civile a été déposée par la FIDH et ses organisations membres Al-Haq, Al Mezan, PCHR (Palestinian Center for Human Rights), la LDH, ainsi que l’Association France Palestine Solidarité (AFPS). Elle vise à saisir un juge d’instruction parisien.
Les faits dénoncés se seraient déroulés entre novembre 2023 et mars 2024, près des hôpitaux al-Nasser et al-Quds à Khan Younès, dans la bande de Gaza, cible de représailles israéliennes meurtrières après l’attaque d’envergure menée par le mouvement islamiste palestinien Hamas sur le sol israélien le 7 octobre 2023.
Selon la plainte, dont l’AFP a eu connaissance, « dans les zones où l’unité intervient, la stratégie semble consister à ouvrir le feu sur toute personne en âge de servir dans l’armée, même en l’absence de menace manifeste. (…) Chaque tir effectué par les snipers a pour objectif non pas de blesser, mais de tuer ».
Selon la plainte, « ces crimes sont susceptibles de revêtir non seulement la qualification de crimes de guerre, mais aussi de génocide et d’autres crimes contre l’humanité ».
« La paix ne pourra être rétablie dans cette région que si la justice passe, ce qui impose de lutter contre l’impunité », a affirmé à l’AFP Emmanuel Daoud, avocat de la LDH et de l’AFPS. « Cela ne concerne pas seulement les soldats mais aussi la chaîne de commandements », a-t-il ajouté.
Des dizaines de binationaux impliqués
Depuis le 7 octobre 2023, date de l’attaque du Hamas contre Israël, plusieurs centaines de binationaux franco-israéliens ont participé aux opérations militaires israéliennes à Gaza.
En vertu du principe de compétence extraterritoriale, ces ressortissants peuvent faire l’objet de poursuites judiciaires en France si des crimes graves sont suspectés.
Des plaintes similaires ont été déposées en Belgique en décembre 2024, et en Afrique du Sud plusieurs mois auparavant. Des enquêtes sont en cours. D’autres procédures sont annoncées en Allemagne et en Italie, visant également des membres binationaux de la “Ghost Unit”.