Il aurait pu, lors de sa conférence annuelle au cours de laquelle il répond à des questions sélectionnées par ses services, commencer, comme d’habitude, par les problèmes et soucis quotidiens de ses concitoyens. Il aurait pu évoquer, par exemple, le prix des pommes de terre qui, de janvier à juin, a augmenté de 52%, un peu plus que celui du chou ou des betteraves. Il aurait pu, mais il a préféré parler tout de suite de la guerre contre l’Ukraine et la justifier.
Droit dans ses bottes, le maître du Kremlin a répété son récit : la guerre a été imposée par l’Ukraine et ses alliés, «nous ne nous considérons pas responsables pour la mort des gens, parce que nous n’avons pas commencé cette guerre (…) La balle est entièrement dans le camp de nos adversaires occidentaux, les dirigeants du régime de Kiev et leurs sponsors européens en premier lieu, qualifiés mercredi de « petits cochons » (…) Nous sommes prêts et disposés à mettre fin à ce conflit pacifiquement en s’attaquant aux causes profondes de cette crise». Sa rhétorique classique…
Et il a mis en garde les Européens contre de « lourdes conséquences » en cas de recours aux actifs russes pour financer l’Ukraine. « C’est un braquage », a-t-il affirmé traitant les Européens de « cambrioleurs ». Cependant, la Russie n’a aucun moyen réel de contraindre ces Européens. Où porterait-elle plainte ?
Pourquoi Poutine a- t-il axé sa conférence sur la guerre ? Parce que le conflit, qui devait être vite réglé, inquiète de plus en plus. En mai 2023, les Russes pensaient, à 57 % contre 39 %, que la plupart des personnes de leur entourage social soutenaient la guerre. En octobre 2025, en revanche, ils pensaient, à 55 % contre 45 %, que les membres de leur cercle proche étaient pour la plupart opposés à la guerre. Selon Vladimir Zvonovsky, sociologue à Samara, en Russie, un récent sondage montre que le nombre de personnes déclarant que leur bien-être se détériore est trois fois plus élevé que celui des personnes déclarant qu’il s’améliore. Des sondages indiquent qu’une très large majorité souhaite la fin de la guerre mais que seulement 47 % s’attendent à ce que Vladimir Poutine y parvienne.
En attendant, l’inflation est toujours élevée -officiellement autour de 6,6%- et le pouvoir va augmenter le taux de TVA, de 20 à 22 %, pour financer les dépenses de l’armée, de la police et d’autres services spéciaux.
L’économie russe ne s’effondre pas, mais elle commence à montrer des signes de fatigue et l’année prochaine sera plus difficile.
Vladimir Poutine, qui est conscient de la lassitude et de la population et des faibles avancées de son armée malgré les déclarations victorieuses, va-t-il négocier avec Trump une sortie par le haut aux dépens de l’Ukraine. Pas impossible. Américains et Russes parlent surtout de commerce, d’affaires et de dollars lors qu’Européens et Ukrainiens mettent en avant le droit international, la souveraineté, la morale…
