Certains attendent depuis plus de trente ans. Enseignants ou agents administratifs, ils sont fonctionnaires en République démocratique du Congo et travaillent encore, attendant désespérément un pécule, une pension et une reconnaissance qui ne viennent pas. « Je voudrais que l’Etat me fasse partir avec honneur ! », déclare Bayard Kumwimba Dyuba, 84 ans, instituteur dans une école primaire de Lubumbashi, dans le sud-est du pays. L’esprit est vif, mais le dos voûté et « l’audition difficile« , s’excuse le petit homme jovial, chemise jaune et casquette bleue, en demandant qu’on répète la question. Pourquoi ne part-il pas à la retraite, alors ? « Je veux partir ! lance-t-il. Mais pas comme ça, sans rien ! Je voudrais qu’on me donne ce que je mérite. » Une somme au titre de son « décompte final« , quelque chose comme 30 000 dollars (27 316 euros), espère-t-il, suivie d’une pension versée régulièrement. Mais depuis des années, beaucoup d’agents de l’Etat sont oubliés, malgré une loi de 2016 stipulant que sont admis à la retraite ceux ayant atteint l’âge de 65 ans ou cumulé 35 ans de carrière. Pourquoi ne part-il pas à la retraite, alors ? «
En septembre dernier, le ministre de la Fonction publique, Jean-Pierre Lihau, avait estimé à 350 000 le nombre d’agents éligibles à la retraite. « 14 000 ont plus de 90 ans, 256 sont centenaires. Le plus vieux a 110 ans« , détaillait-il, en affirmant vouloir œuvrer à un « départ progressif des concernés à une retraite qui soit digne par rapport au passé« . « C’est du déjà entendu, chaque ministre dit la même chose et ensuite rien ne se passe ! », critique Hubert Tshiswaka, directeur de l’Institut de recherche en droits humains, qui défend à Lubumbashi les dossiers d’anciens salariés d’entreprises publiques admissibles à la retraite. Le ministère de la Fonction publique n’a pas précisé quelles mesures étaient prises pour permettre le départ de ses vieux agents et n’a pas donné suite aux sollicitations de l’AFP.