En 2011, le vice-président Biden lance à Vladimir poutine: « je vous regarde du fond des yeux et je pense que vous n’avez pas d’âme ». « Nous nous comprenons l’un l’autre » lui répond le Premier ministre russe. Dix ans plus tard, les deux hommes, présidents, n’ont pas changé et les échanges sont toujours aussi vifs et francs. Qualifié de « tueur », le maître du Kremlin ironise: « c’est celui qui le dit qui l’est ».
A Genève qui retrouve cet après-midi sa place de deuxième centre diplomatique international, les discussions vont durer plusieurs heures avec un but principal: ne pas effacer les différences, mais apaiser le climat, le plus dégradé depuis la fin de la guerre froide perdue par l’URSS, une défaite que Poutine veut faire oublier au nom d’une Russie reconnue comme une grande puissance incontournable et présente dans le monde d’aujourd’hui. Un apaisement et surtout tenter de définir les moyens d’un réel dialogue. Ils arrivent avec les mêmes mots: « stable », »prévisible ». Fini le temps de l’impulsif Trump… Et, avant tout, Biden et Poutine tracent leurs lignes rouges. Pour l’Américain, c’est la poursuite des « agressions » de Moscou, l’Ukraine, les cyberattaques, Navalny qui ne doit pas mourir en prison. Pour le Russe, également l’Ukraine qui ne doit jamais rejoindre l’OTAN et tout ce qu’il considère comme une ingérence dans ses affaires intérieures, dont Navalny.
Une fois ces lignes rouges fixées, Biden et Poutine pourront aborder les sujets qui peuvent les rapprocher. Un échange de prisonniers est évoqué tout comme des progrès dans le désarmement nucléaire. Ils feront le point de la situation en Syrie, en Libye, au Proche Orient, en Afrique aussi où Moscou joue l’entrisme au détriment des alliés des Etats-Unis. Même la Biélorussie et son dictateur Loukachenko dont Poutine se méfie font partie des points sur lesquels la tension peut baisser.
La Chine fera forcément partie de ce dialogue: si l’on note des coopérations renforcées entre Moscou et Pékin, on sait que Poutine refuse toute domination chinoise et que cela le rapproche de Biden.
Joe Biden, briefé longuement par une douzaine d’experts sait où il va. Il a la connaissance et l’expérience. Avec lui, la stratégie poutinienne -déstabiliser, dire, convaincre – ne marchera pas et il a refusé de tenir une conférence de presse commune pour éviter tout piège. ¨Poutine, lui, est arrivé en vainqueur car c’est son homologue qui a demandé l’entretien. Une sorte de reconnaissance de son importance. Une première petite victoire…