L’Union Africaine, les organisations régionales africaines, l’ONU, l’Union Européenne s’inquiètent et demandent l’arrêt des combats au Nord Kivu et des négociations. Encore et toujours des mots forts, des promesses de poursuivre les fauteurs de guerre, mais zéro action efficace. Certes, les Nations Unies et la SADC (Communauté pour le développement de l’Afrique australe), entretiennent des forces combattantes sur le terrain qui ne peuvent mettre fin aux combats et perdent des hommes – au moins un Uruguayen, treize Sud-Africains et trois Malawites viennent d’être tués.
Le monde impuissant préfère ne pas trop regarder ce qui se passe dans l’Est de la République démocratique du Congo et ses médias ne lui consacrent que peu de lignes ou d’images. Et pourtant, la situation y est dramatique : plus de 400 000 déplacés depuis le début d l’année, qui s’ajoutent à des millions d’autres, quelque 120 groupes armés qui se battent, des milliers de morts.
Schématiquement, l’armée congolaise renforcée par les Wazalendos -patriotes- qui recrutent des enfants luttent contre le M23 -Mouvement du 23 mars- soutenu par l’armée rwandaise. Un conflit qui trouve ses racines dans le génocide rwandais, dans le traitement des Tutsis. En 2009, le 23 mars, un accord avait été signé par Kinshasa qui garantissait aux rebelles tutsis , surtout congolais et aussi rwandais, leur réintégration dans l’armée et le maintien de leurs intérêts économiques. En 2012, les anciens rebelles considéraient que l’Etat ne tenait pas ses engagements et repartaient au combat. Depuis les rapports entre le M23 et le pouvoir sont marqués par des accords, des ruptures, des combats.
Le Rwanda de Paul Kagame s’est rangé aux côtés du M23 au nom de la défense des Tutsis qui, estime-t-il, sont maltraités. Celui qui a pris le pouvoir à Kigali au terme du génocide commis par les Hutus en 1994, dément toute implication directe et affirme simplement se défendre contre des menaces. Toutefois, l’ONU a documenté la participation de 3 à 4 000 militaires rwandais.
Si le conflit qui ravage le Nord Kivu résulte de motifs politiques, on se bat surtout pour des intérêts économiques, le contrôle de l’exploitation de minerais précieux. La région est très riche en ressources naturelles comme le coltan, l’or et la cassitérite, dont le groupe rebelle fait commerce avec le Rwanda. La République démocratique du Congo abrite environ 70 % des réserves mondiales de cobalt, un minerai essentiel pour alimenter les batteries lithium-ion des téléphones portables, des véhicules électriques et de nombreux modèles d’e-cigarettes.
Le Rwanda n’est pas le seul voisin à s’intéresser à ses richesses, l’Ouganda et le Burundi sont également sur les rangs… Leurs militaires sont aussi présents, dans un camp ou dans l’autre. Et le Nord Kivu plonge dans le chaos. Selon le site Kinshasa.com, la capitale Goma est tombée ce matin aux mains du M23. Des tirs nourris et sporadiques ont résonné et des scènes de pillages ont été signalées. Des évasions massives ont eu lieu à la prison de Munzenze, totalement incendiée.
Une lueur d’espoir : le président kényan William Ruto a annoncé dans un communiqué réunir « dans les prochaines 48 heures » un sommet extraordinaire de la Communauté des Etats d’Afrique de l’Est (EAC) en présence des présidents congolais Félix Tshisekedi et rwandais Paul Kagame. En décembre dernier, une rencontre avait été annulée, Kagame ne l’estimant « plus pertinente » et les combats avaient été relancés.