Quand l’Ukraine et les Etats-Unis ont commencé à évoquer la présence de soldats nord-coréens en Russie, l’ambassadeur russe à l’ONU a dénoncé un « mensonge éhonté », puis Moscou a ironisé en prétendant qu’il s’agissait , en Bouriatie, de recrues bouriates qui ressemblaient à des Coréens… Les preuves devenant évidentes, surtout des images prises par des satellites, Moscou et Pyongyang ont invoqué leur accord de partenariat stratégique global signé le 19 juin qui prévoit une assistance mutuelle en cas d’agression. Les deux capitales vont même jusqu’à se justifier en citant l’article 51 de la charte des Nations unies qui reconnaît « le droit de légitime défense individuelle ou collective dans le cas où un membre des Nations unies est l’objet d’une agression armée ». Poutine oublie seulement qu’il n’y a qu’un seul agresseur, lui.
Pourquoi le dictateur russe fait-il appel à son nouvel allié asiatique ? Le nouveau patron de l’Otan, le Néerlandais Mark Rutte pense qu’il en a vraiment besoin : « Plus de 600 000 soldats russes ont été tués ou blessés. Poutine est incapable de poursuivre son assaut contre l’Ukraine sans soutien étranger ». Pas sûr que cette explication d’un Poutine en « désarroi croissant » soit totalement juste car sur le terrain, ses forces progressent chaque jour.
Le maître du Kremlin, en faisant appel à Kim Jong Un, teste l’Occident qu’il a toujours vu comme faible et décadent. Et son ministre des Affaires étrangères, Lavrov, enfonce le clou en affirmant, à un journal turc, à propos des Etats-Unis que « sous la présidence actuelle qui a poussé jusqu’au bout la spirale de la russophobie, nos deux pays sont au bord de l’affrontement direct ». En réaction, Washington et la bonne cinquantaine de pays qui soutiennent l’Ukraine se sont, pour l’instant contentés de dire que la présence de soldats nord-coréens est une « question grave », « une escalade significative qui menace la paix mondiale », une internationalisation du conflit. Et Washington a annoncé une nouvelle aide militaire de 425 millions de dollars.
Déçu et inquiet, Volodymyr Zelensky a regretté la passivité de ses alliés, leur réaction « zéro » et leur interdiction maintenue d’utiliser des missiles à longue portée.
Combien y a-t-il de militaires de Pyongyang en Russie ? On ne le sait exactement, mais ils seraient selon Kiev et Séoul bientôt quelque 12000 dont plusieurs milliers déployés dans la région de Koursk. Ils n’ont pas encore participé à des combats ni mis le pied sur le sol ukrainien. Pas sûr d’ailleurs qu’ils se battent un jour. Leur présence pourrait, en effet, être plus politique et symbolique que militaire. La Russie montre à nouveau, après le sommet des Brics à Kazan, qu’elle n’est pas isolée et la Corée du Nord qu’elle joue maintenant dans la cour des grands, qu’elle peut tenir tête aux Etats-Unis, menacer la Corée du Sud, son « principal ennemi » avec lequel il n’est plus question de réconciliation.