A vouloir éteindre une polémique, on la fait parfois repartir de plus belle. La maison d’édition allemande Ravensburger l’a appris à ses dépens après avoir retiré de son catalogue deux albums pour enfants ayant pour héros Winnetou, cet Apache imaginaire créé à la fin du XIXe siècle par le romancier Karl May (1842-1912) et ultra-connu outre-Rhin.
Publiés pour accompagner le film Der junge Häuptling Winnetou (« le jeune chef Winnetou »), réalisé par Mike Marzuk et sorti au cinéma le 11 août, les deux ouvrages n’ont fait qu’un passage éclair en librairie. En raison de « nombreux retours négatifs », la maison d’édition a décidé après seulement quelques jours de ne plus les proposer à la vente, expliquant qu’ils véhiculaient « un imaginaire romancé et plein de clichés », sans rapport avec la véritable histoire de « l’oppression des peuples indigènes ». Lundi 22 août, le patron de Ravensburger, Clemens Maier, a assuré que « [s]on intention n’a jamais été de blesser qui que ce soit », ajoutant que sa maison se voulait « très attentive à la question de la diversité et de l’appropriation culturelle ». Loin de calmer les esprits, la décision de retirer les deux livres de la vente a été très vivement critiquée. Pour le tabloïd conservateur Bild, les éditions Ravensburger ont capitulé devant « l’hystérie wokiste ». « Cela rappelle la période du stalinisme, quand les aventures de Winnetou ne pouvaient circuler que sous le manteau », s’est également indigné Hubertus Knabe, l’ex-directeur du Mémorial de Berlin-Hohenschönhausen, siège de la prison centrale de la Stasi du temps de l’Allemagne de l’Est. A gauche également, plusieurs personnalités ont exprimé leur incompréhension.
Par leur virulence, ces réactions sont venues rappeler la place qu’occupe Winnetou en Allemagne, où ses aventures ont fait l’objet de nombreuses adaptations télévisées et cinématographiques ainsi que de multiples mises en scène théâtrales.