Les bombardements russes qui ont massivement frappé l’Ukraine depuis lundi matin se poursuivent avec plusieurs frappes cette nuit dans la région de Kiev et à Mykolaïv dans le sud du pays, selon les autorités ukrainiennes. L’armée ukrainienne tente en parallèle de poursuivre sa contre-offensive en direction de Kherson mais aussi sur la ligne de front à l’Est.
Les autorités d’occupation russes de la région de Kherson ont demandé à Moscou d’organiser l’évacuation des civils de ce territoire annexé par la Russie fin septembre et visé par une contre-offensive de l’armée ukrainienne.
«Nous avons suggéré que tous les habitants de la région de Kherson, qui souhaitent se protéger des frappes de missiles (ukrainiens), puissent se rendre dans d’autres régions» russes, a indiqué sur Telegram le chef de l’administration d’occupation régionale, Vladimir Saldo. «Emmenez vos enfants et partez», a-t-il exhorté. La Russie va aider à l’évacuation.
Avancée des pro Russes
Les forces russes se trouvaient ce jeudi aux portes de Bakhmout après la capture de deux villages près de cette ville de l’est de l’Ukraine, ont annoncé les forces prorusses de la région. Selon la chaîne Telegram des combattants séparatistes de Donetsk, ils ont pris le contrôle des villages d’Opytné et d’Ivangrad, directement au sud de Bakhmout, ville qu’ils tentent de conquérir depuis le mois d’août et seule portion du front où les troupes de Moscou avancent en ce moment.
L’armée ukrainienne a, elle, affirmé avoir repoussé les attaques russes à Ivangrad, à Bakhmout et dans d’autres villages plus au sud sur cette ligne de front. Ville de quelque 70.000 habitants avant la guerre, connue pour son vin et sa mine de sel, Bakhmout est l’objet de combats dont l’intensité a redoublé depuis deux semaines. Des journalistes de l’AFP y ont constaté mercredi une cité en grande partie vidée de ses habitants et où les échanges de tirs d’artillerie et d’armes à feu résonnent.
Frappes sur Belgorod
Les autorités russes ont accusé ce jeudi l’Ukraine d’avoir bombardé un immeuble résidentiel à Belgorod, une ville importante rarement touchée par des tirs et située dans une région frontalière de l’Ukraine.
«Les forces armées ukrainiennes ont bombardé Belgorod. La défense antiaérienne a été activé. Il y a des destructions dans un immeuble résidentiel», a indiqué sur Telegram Viatcheslav Gladkov, le gouverneur de cette région où les tirs se sont multipliés ces dernières semaines. «Les informations sur de (potentielles) victimes sont en train d’être précisées», a-t-il ajouté, publiant des photos de débris jonchant une rue et ayant endommagé une voiture. Selon lui, une partie non explosée d’un projectile est aussi tombée sur le terrain de sport d’un lycée de la ville.
Des images diffusées sur les réseaux sociaux ont montré le dernier étage d’un immeuble résidentiel éventré. Une vidéo montre l’impact, dans un panache de fumée noire.
M. Gladkov a également accusé Kiev d’avoir tiré sur le village russe de Krasnoïé, situé à la frontière avec l’Ukraine. «Il y a des destructions sur le terrain de l’école», a-t-il indiqué, en publiant la photo d’un cratère avec un débris d’obus.
Traque des collabos ?
Des rumeurs bruissent dans les ruines d’Izioum. À l’ombre d’un immeuble qui manque de s’effondrer, un homme égrène les ragots: «Natalia a travaillé avec une organisation humanitaire russe… Bogdan se prenait en photos avec les Russes… Volodymyr a continué d’être postier sous l’occupation…» Où sont-ils tous, désormais? L’homme dit ne pas savoir. Les collaborateurs ont le plus souvent disparu dès la libération d’Izioum: en fuite avec les maîtres russes ou incarcérés par les autorités ukrainiennes.
Poutine : hub gazier en Turquie
Le président Poutine a déclaré ce jeudi à son homologue turc Erdogan que la Turquie était la voie la plus fiable pour livrer du gaz à l’Union européenne et a proposé d’y construire ce qu’il a appelé un centre d’approvisionnement.
«S’agissant de ce hub, que nous pourrions créer ensemble, bien sûr, ce serait aussi une plate-forme non seulement pour se fournir, mais aussi pour déterminer le prix, car c’est une question très importante – la question de la tarification», a déclaré Poutine. «Aujourd’hui, ces prix sont exorbitants; nous pourrions facilement réglementer au niveau normal du marché, sans aucune connotation politique.»
ONU : Moscou condamné
L’Assemblée générale des 193 Etats membres réunie en urgence depuis lundi a adopté cette résolution avec 143 voix pour, face à cinq pays contre et 35 qui se sont abstenus, parmi lesquels la Chine, l’Inde, le Pakistan et l’Afrique du Sud, malgré des efforts diplomatiques des Etats-Unis.
« 143 nations se sont tenues du côté de la liberté, de la souveraineté et de l’intégrité territoriale », a déclaré le président américain dans un communiqué, affirmant que la Russie ne pouvait « pas effacer un Etat souverain de la carte ».
Les cinq Etats qui ont voté contre sont, sans surprise, la Russie, le Bélarus, la Syrie, la Corée du Nord et le Nicaragua.
Par rapport à un vote datant de mars, condamnant l’invasion de l’Ukraine, le soutien à la Russie s’est très légèrement érodé, avec deux voix de plus contre Moscou.
Le Bangladesh, l’Irak et le Sénégal, qui s’étaient abstenus en mars, ont cette fois voté pour condamner la Russie.
L’Érythrée, qui avait rejeté la résolution en mars, s’est cette fois abstenue.
Le Nicaragua, qui subit des critiques toujours plus vives de la communauté internationale en matière de droits humains, a fait le chemin inverse, puisqu’il s’était abstenu en mars et a cette fois refusé de condamner Moscou.
Avec ce texte, co-rédigé par l’Union européenne et présenté par l’Ukraine, les Occidentaux, Washington en tête, entendaient démontrer que le président Vladimir Poutine était « isolé » sur la scène internationale, sept mois après le déclenchement de la guerre en Ukraine.
A la suite de ce vote, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, cité par le journal russe Izvestia, a déclaré que «les objectifs» des «opérations spéciales» en Ukraine restaient «inchangés», mais que celles-ci pourraient s’achever «dans des négociations» et que Moscou restait «ouvert à ces négociations».
Zelensky devant le Conseil de l’Europe
Il faut que la Russie soit reconnue comme état agresseur, et chaque assassin et boucher doit être traduit en justice pour les crimes perpétrés pendant cette guerre», a lancé Volodymyr Zelensky lors d’une allocution en visioconférence à l’occasion d’une session de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE). «Il faut créer les mécanismes juridiques indispensables pour ce faire (…) Vous avez un rôle particulier pour créer un tribunal spécial pour traduire en justice la Russie et appliquer les principes de droit international», a encore lancé le président ukrainien. Celui-ci avait déjà formulé une telle demande fin septembre devant les Nations unies, de création d’une juridiction pour juger le «crime d’agression» de la Russie contre l’Ukraine.
«Il faut des garanties pour assurer une paix à long terme. Nous avons pu voir comment la Russie rejette tout dialogue, comment elle veut parler la langue de la terreur. Ce fait doit être reconnu à tous les niveaux, juridique, politique», a-t-il ajouté, reprochant au passage au Conseil de l’Europe d’avoir maintenu en son giron la Russie après que celle-ci a annexé la Crimée, en 2014. Le «prétexte» du dialogue avec la Russie ne doit pas «masquer certaines facettes de cette guerre» et servir de «camouflage» à la «vérité», a-t-il encore estimé.
Nouvel échange de prisonniers
L’Ukraine et la Russie ont annoncé chacun de leur côté avoir procédé à un nouvel échange de prisonniers concernant 20 personnes dans chaque camp, deux jours après une autre opération de ce type entre Kiev et Moscou.
«Nouvel échange de prisonniers, nouveaux moments de joie. On a réussi a libéré 20 personnes», s’est félicité sur Telegram le chef du cabinet de la présidence ukrainienne, Andriï Iermak. Parmi ces 20 combattants figurent «14 soldats des forces armées ukrainiennes, 4 membres de la défense territoriale, un membre de la garde nationale et un membre des forces navales ukrainiennes», a précisé Iermak.