Par Sayda BEN ZINEB
Artiste passionnée, Arbia Loudhaief a côtoyé depuis ses débuts les fins connaisseurs de l’art en Tunisie. Sa passion, elle l’a accompagnée par des formations au Centre des Beaux Arts de Radès sous la direction de Safia Farhat et au Centre italien Dante Alighieri avec Sylvain Monteleone. Après le dessin et l’aquarelle, l’artiste s’est lancée dans la photographie puis la peinture à l’huile. Elle a eu un parcours intense ponctué d’expositions personnelles et collectives en Tunisie et à l’Etranger.
Présidente de l’Association des artistes plasticiens sans frontières, Arbia a tissé de nombreuses relations ici et ailleurs avec des artistes de renommée internationale, dans le Jura en France, à Montréal au Canada et à Meknès au Maroc, sans oublier ses autres pérégrinations à travers l’Espagne, la Grèce et l’Italie.
Généreuse de cœur et d’âme, Arbia a sacrifié une belle tranche de sa vie, de son temps pour prendre soin de ceux qu’elle aimait et qu’elle aimera toujours. En parallèle, elle crée, fait des recherches, tente de nouvelles pistes, innove et évolue. En est témoin, son exposition actuelle qui se tient depuis quelques jours au Concept Store Sameh HaBachi () sous l’intitulé : « Regards croisés ».
A voir ses œuvres, quelque chose nous retient ; ces barres, barrières, barreaux qui trônent sur la plupart de ses toiles. Selon l’artiste, « la vie n’est qu’une prison, là où l’homme est condamné à perpétuité… ». Ses personnages sont représentés de face ou de profil avec des expressions inavouées et des traits tendus, aux regards hagards, égarés par la peur, la souffrance. Une touche évoquant des silhouettes résignées, à la recherche de la voie du Salut.
L’ensemble est peint dans des tons d’une palette dure qui serait l’incarnation du mal être dont souffrent les personnages. Pour Arbia Loudhaief, on assiste à la violation de la dignité humaine par ces grandes puissances face à l’impuissance des pauvres dont les regards se croisent pour se raconter la misère, la faim, la soif, voire l’Horreur… En filigrane, toutes les misères du monde qui se trament ici et ailleurs suite aux phénomènes de guerres, de l’immigration clandestine et des barques de la mort.
« L’Aveugle, le Sourd et le Muet », titre de la jolie toile acquise dernièrement par le ministère de la Culture, évoque un autre registre ; les signes de la Sagesse selon la symbolique asiatique. Il s’agit des se couvrir par la main les yeux, l’oreille et la bouche ; ne pas voir le mal, ne pas entendre le mal et ne pas dire le mal. D’après la légende, celui qui suit cette maxime, il ne lui arriverait que du Bien. Selon l’explication d’Arbia Loudhaief, l’une des plus anciennes représentations connues de ces signes se trouve dans l’un des sanctuaires au Japon et est attribuée au sculpteur japonais, Hidari Jingoro (1584-1644).
Profitons encore du temps qui reste et allons voir cette exposition qui vaut le détour !