Deux journalistes français sont jugés lundi à Paris, soupçonnés d’avoir voulu obtenir deux millions d’euros en 2015 en menaçant de publier un livre explosif.
Déjà auteurs en 2012 d’un précédent ouvrage sur Mohammed VI interdit au Maroc, « Le roi prédateur », Eric Laurent et Catherine Graciet ont à l’époque signé, quelques mois auparavant, un nouveau contrat d’édition avec la maison d’édition française Le Seuil pour un livre sur le même sujet.
Le 23 juillet 2015, Eric Laurent contacte le secrétariat particulier du roi du Maroc en vue d’obtenir un rendez-vous, finalement organisé le 11 août avec un émissaire de la monarchie, l’avocat Hicham Naciri, au bar d’un palace parisien. Lors de cette rencontre, M. Laurent annonce la publication prévue début 2016 du livre, contenant des informations embarrassantes pour la monarchie.
Mais les versions divergent ensuite: selon le journaliste, c’est Me Naciri qui lui propose un accord financier en vue de la non-publication de l’ouvrage. Au contraire, le Royaume, défendu au début de la procédure par l’actuel garde des Sceaux et ancien avocat Eric Dupond-Moretti, assure que la proposition émanait du journaliste, qui réclamait trois millions d’euros.
A l’issue d’une troisième rencontre, les deux journalistes sont interpellés avec deux enveloppes contenant chacune 40.000 euros en liquide.
Ils apprendront alors que les trois rencontres ont été enregistrées en cachette par l’émissaire du roi, qui a remis des copies aux enquêteurs. Initialement mis en examen aussi pour extorsion, Eric Laurent, 75 ans, et Catherine Graciet, 48 ans, ont bénéficié d’un non-lieu pour ce chef à l’issue de l’information judiciaire, qui a duré près de six ans.
Pendant l’instruction, ils ont reconnu avoir accepté un contrat pour se « défaire » du livre dont les conséquences géopolitiques les « inquiétaient », mais ils ont contesté toute menace et tout chantage.