Ludique et très sérieux à la fois, le concours du Mollusque de l’année, organisé par des chercheurs en Allemagne pour la troisième année, vient de désigner son gagnant 2023 : l’ormeau chilien. Cette espèce d’escargot de mer a gagné le droit d’être étudié de plus près. Son atout : il pourrait être très précieux dans le traitement de certains cancers.
Escargots terrestres ou marins, limaces, huîtres… Leur point commun ? Tous ont une tête, un tube digestif et un « pied » musculaire pour se déplacer. Ce sont des mollusques. Ils existent depuis plus de 500 millions d’années et représentent, après les insectes, la subdivision animale la plus nombreuse de la planète. Mais ces créatures restent encore méconnues. Les experts n’ont décrit que 85 000 espèces dans le monde sur une estimation de 150 000 à 200 000.
« De tous les invertébrés, les mollusques sont les plus appréciés par l’homme mais cet embranchement est étonnamment négligé dans la recherche génétique. » Le centre d’étude de la biodiversité génomique (LOEWE), basé à Francfort, la société Senckenberg pour la recherche sur la nature et la société internationale pour la recherche sur les mollusques en Allemagne, ont décidé d’y remédier de manière originale. Pour mettre sur le devant de la scène ces drôles d’invertébrés, ils organisent depuis 2021 un concours du mollusque international de l’année. « L’objectif est de sensibiliser à la richesse de la diversité des mollusques et à la nécessité de la protéger », expliquent les organisateurs.
Après un spectaculaire escargot peint cubain (Polymita picta) l’an dernier et une cousine des pieuvres, l’argonaute voilier (Argonauta argo) en 2021, les internautes ont finalement désigné comme vainqueur cette fois-ci, l’ormeau chilien, une espèce de gros escargot de mer comestible connu sous le nom de « loco ». Une espèce que l’on trouve principalement dans l’ océan Pacifique.
Derrière ce concours, il y a évidemment un intérêt scientifique. Le mollusque gagnant verra son génome cartographié, afin de mieux comprendre son évolution et ses avantages potentiels pour l’humanité. « Cela permettra d’approfondir les recherches sur cet animal en particulier, mais aussi de mieux comprendre l’évolution de tous les mollusques et leur mode de vie », a précisé une des scientifiques du centre d’étude allemand.
Quels secrets ce génome pourrait-il révéler ? « Le « loco » est utilisé comme nourriture par les humains depuis l’époque précolombienne. Il fait l’objet d’une surexploitation depuis plus d’un demi-siècle et certaines populations de ce mollusque vivent dans des zones côtières fortement polluées. Son génome permettra de comprendre comment les invertébrés marins font face, au niveau moléculaire, à la pêche intensive et tolèrent les environnements pollués », indiquent les chercheurs sur le site dédié à cette compétition.
L’étude de cette espèce pourrait aussi permettre de faire avancer la recherche médicale et conduire à la découverte de nouvelles molécules d’intérêt pharmaceutique pour l’homme. Pour cause, « l’hémocyanine, un transporteur d’oxygène présent dans le sang de cet ormeau, serait en mesure de combattre les cellules de certains types de cancer ».