La démission du Premier ministre contesté Ariel henry a fait naître un espoir d’apaisement à Haïti où les gangs contrôlent 80% de la capitale Port au Prince et s’étendent dans différentes régions. Un conseil présidentiel de transition devrait être nommé avec la participation de la société civile, du patronat et des syndicats afin de résoudre la crise politique et d’ouvrir la voie à des élections.
Une certaine satisfaction prévaut dans le pays, mais ce conseil ne fait pas l’unanimité et certains doutent qu’il puisse ramener le calme.
L’histoire d’Haïti est faite de violence, d’instabilité, de coups d’Etat, d’occupation américaine et de catastrophes naturelles. Tout le monde se souvient des « tontons macoutes “des Duvalier”, père puis fils, qui faisaient régner leur loi, intimidaient et massacraient les opposants. Chaque homme politique entretenait sa petite armée, son gang qui servait ses ambitions de pouvoir. Le père Aristide entretenait, lui, ses « chimères » qui, à sa chute en 2004, se sont retrouvées sans but et ont sombré dans la criminalité. Et les gangs se sont développés, pratiquant le banditisme pour leur propre compte ou toujours au service de politiciens, de trafiquants de drogue ou d’hommes d’affaires.
Aujourd’hui, ils regroupent plus d’hommes que la police. Ils enlèvent, rançonnent, tuent… 41% des décès enregistrés d’août 2022 à juillet 2023 sont dus à leur violence estime Médecins sans frontière.



Depuis quelques semaines, Jimmy Chérizier, surnommé Barbecue, chef du gang « la famille G9 » a fait irruption spectaculaire sur la scène haïtienne : attaque de prisons, libération de près de 5000 prisonniers, attaques du port, de l’aéroport, de mairies, de tribunaux et appels répétés à la démission du Premier ministre. “Nous ne faisons pas une révolution pacifique, nous faisons une révolution sanglante” affirme Barbecue. Ancien policier, il est notamment impliqué dans le massacre de la Saline, 71 morts en novembre 2018.
Un autre homme se veut « le chef des insurgés », Guy Philippe, ancien candidat à la présidence en 2006, élu sénateur en 2016 mais emprisonné pendant six ans aux Etats-Unis avant d’avoir pu siéger, pour blanchiment de l’argent de la drogue. Il vient de rentrer au pays, escorté par des paramilitaires et brigue la présidence.
On ne sait si les deux hommes ont des liens entre eux, mais on le soupçonne. Chérizier dit simplement qu’il soutient tous ceux qui travaillent pour le changement.
Un oublié se rappelle aussi aux bons souvenirs des Haïtiens, Michel Martelly, président de 2011 à 2016. Encore un qui s’est servi des gangs et a contribué à l’insécurité. Il est soupçonné d’avoir été parmi les commanditaires de l’assassinat du président Jovenel Moïse en juillet 2021. Il s’en défend et se présente comme “rassembleur” . Certaines sources pensent qu’il tire les ficelles.
Ce qui semble sûr, c’est que rien ne pourra se faire sans l’approbation de Barbecue, voire de Philippe et peut-être de Martelly. Les deux premiers ont rejeté l’accord conclu par la CARICOM et la mise en place d’un conseil présidentiel de transition. C’est à eux de conduire cette transition.
Le chef de « la famille G9 » est clair : Nous sommes conscients que les hommes armés ont commis des actes nuisibles, mais la société doit leur pardonner et s’unir pour repenser une nouvelle Haïti. Ce sont les gens des quartiers populaires qui doivent prendre leur destin en main pour choisir leurs dirigeants ».En attendant, le Kenya a décidé de suspendre temporairement son projet d’envoyer des policiers en Haïti.
« Sans une administration politique en Haïti, il n’y a pas d’ancrage sur lequel un déploiement de police puisse reposer, c’est pourquoi le Gouvernement attendra l’installation d’un nouveau Gouvernement en Haïti avant de prendre de nouvelles décisions , indique Nairobi. Les Etats-Unis comprennent, mais déploreraient tout retard.


