Un avion de ligne pakistanais se pose à Kaboul et on parle, comme d’un succès, du premier signe de normalisation économique ! Un avion du pays parrain des talibans qui les aide dans le Panchir contre Ahmad Massoud ne peut masquer la situation, faire croire à un changement de ces nouveaux dirigeants si semblables à ceux renversés en 2001. Ils mentent, assassinent des opposants et ce n’est pas parce que des femmes peuvent aller à l’université voilées et cachées des hommes qu’un air de liberté flotte sur Kaboul. Les femmes ont peur, beaucoup ont été privées de leur travail, notamment les journalistes. Il faut parler à ces nouveaux maîtres pour ne pas empirer les souffrances du peuple afghan qui subit sans consentir. Il faut l’aider à ne pas sombrer dans la famine – l’ONU réclame 600 millions de dollars – tout en empêchant les talibans de confisquer ces aides, de les distribuer en fonction des allégeances. Et ne pas oublier que les résistants du Panchir manquent de tout. Les armer est une autre question. Il faut, mais comment ?
Avant la débâcle américaine, même si le retrait se justifiait, le pays d’Ashraf Ghani, ce président qui a préféré fuir avec de monceaux d’argent, dépendait pour 42% de son PIB des aides occidentales. Elles ont cessé et l’argent afghan -environ 10 milliards-ne sort pas des banques américaines. L’Occident aurait donc un moyen de pression sur les talibans. En fait non, car ses « ennemis », Chine en tête, ont commencé à prendre le relais. L’Afghanistan est riche en minerais, dont le précieux lithium, et Pékin ne se soucie pas des droits de l’homme, de la politique intérieure s’il peut tirer des profits, gêner les Etats-Unis. La Russie se méfie mais peut trouver des terrains d’entente, l’Iran a repris ses exportations d’hydrocarbures. Le Pakistan, vassal de la Chine aidera sans compter son protégé qui dorénavant fait partie de la nouvelle route de la soie chère à Xi Jinping.
Il faut parler, il faut empêcher la famine. Mais les pays qui aimeraient trouver de la sagesse et de la modération chez les talibans manquent de leviers pour les faire bouger.