Fondateur en 1928 de la confrérie des Frères musulmans dans une Égypte dominée par les Anglais, Hassan El Banna voyait dans l’islam « la solution [face à l’] invasion militaire, politique, ethnique et sociale venue d’Occident ». Voulant la création d’un État islamique et l’application de la charia, il envisageait une « stratégie de conquête occidentale : « nous poursuivrons cette force maléfique jusqu’à ses propres terres, envahirons son cœur occidental et lutterons pour la vaincre jusqu’à ce que le monde entier crie au nom du Prophète ».
Depuis les années cinquante, à la faveur de mouvements migratoires et de la répression engagée à leur encontre dans le monde musulman à partir des années 1950, les premiers Frères musulmans venus du Moyen-Orient se sont installés en Grande-Bretagne, en Allemagne et en Suisse puis en Belgique, en France et en Italie et ils ne cessent d’étendre leur influence. Un rapport commandé l’an dernier vient d’être en partie dévoilé. Intitulé « Les Frères musulmans et islamisme politique en France », il met en garde contre une « menace pour la cohésion nationale » avec le développement d’un islamisme « par le bas ». Il établit très clairement le caractère anti-républicain et subversif des Frères musulmans et propose des moyens pour remédier à cette menace, résume-t-on à l’Elysée où s’est tenu en fin de matinée un conseil de défense consacré à cet « entrisme » islamiste et aux mesures à prendre.
Les chiffres apparaissent faibles : “139 mosquées affiliés aux Musulmans de France”, « la principale émanation des frères en France » bien qu’ils s’en défendent soit 7% des 2800 lieux de cultes musulmans répertoriés sur le sol national , 91 000 fidèles en moyenne le vendredi, 21 établissements scolaires accueillant 4 200 élèves, 400 personnes, 1 000 au maximum à la tête de la mouvance. Cependant, ils sont actifs dans tous les domaines, notamment la culture, le sport et l’entraide, et cherchent à se faire une place dans la vie municipale. Pas d’actions violentes, de « coups » mais une quête permanente de légitimation et de respectabilité. Les Frères musulmans avancent masqués pour créer de véritables écosystèmes, relève le rapport qui souligne l’importance et le ”dynamisme” de la « prédication 2.0 » Le document tire le signal d’alarme sur « l’activisme d’une nouvelle génération de prédicateurs, souvent formés par les premiers cadres religieux de la mouvance et (..) sujets d’une hybridation avec le salafisme » qui « constitue un facteur majeur de diffusion de l’islamisme via les réseaux sociaux, où ils rencontrent une large audience ».
D’autre part, une note confidentielle établie par le ministère de l’Intérieur et portant sur « les narratifs islamistes de TikTok » indique que cette plateforme « est devenue, pour la sphère islamiste, l’un des viviers d’audience en ligne les plus conséquents. La rhétorique islamiste y est majoritaire par rapport aux autres courants de l’islam et suscite parfois des commentaires plus radicaux que le message initial ». Ainsi ce « conseil à tendance rigoriste » aux femmes musulmanes : « Ma sœur, pour être belle, il ne faut pas souffrir, il faut juste se couvrir ».
S’il sonne l’alarme, le rapport affirme qu’« aucun document récent ne démontre la volonté de Musulmans de France d’établir un État islamique en France ou d’y faire appliquer la charia ». Et, à l’Elysée, on insiste pour dire : « nous sommes tous parfaitement en ligne sur le fait de dire qu’il ne faut pas faire d’amalgame » avec les musulmans car « nous luttons contre l’islamisme et ses dérives radicales ». Le rapport précis qu’il faut éviter de susciter un sentiment de rejet chez les musulmans, favoriser l’enseignement de l’arabe à l’école, faciliter l’installation de cimetière musulman et … reconnaitre un Etat palestinien car le conflit israélo-palestinien sert d’argument à la mouvance frériste.
A l’issue du conseil de défense, le président Macron a annoncé que le rapport serait publié dans les prochains jours et que « compte tenu de l’importance du sujet et de la gravité des faits », il demande d’autres mesures au gouvernement d’ici début juin.