Les pauvres ont une vie plus compliquée que les autres. Au lieu d’obtenir de l’aide et du respect, c’est du mépris et des obstacles qu’ils rencontrent. La pauvreté peut être extrêmement envahissante, elle occupe votre esprit et détermine comment les gens vous regardent, elle affecte également la qualité de votre sommeil, les conditions de vie de vos enfants, comme le fait de devoir leur refuser ce qu’ils demandent et ce tous les jours. Toutes ces frustrations accumulées affectent la disponibilité intellectuelle des individus.
Lorsque l’on vit dans la pauvreté, un état psychologique particulier s’installe, un état qui va influencer la capacité à prendre des décisions sur ce qu’on appelle en psychologie, la « bande passante disponible ». Vous êtes préoccupé, votre esprit jongle constamment avec l’argent, vous faites la somme de ce qui vous manque… rendant votre mental moins disponible pour s’occuper d’autre chose. C’est là que les problèmes se développent, entraînant le pauvre dans un cercle vicieux, souvent animé par des solutions impulsives pour obtenir de l’argent rapidement, généralement mauvaises sur le long terme, comme un manque de formation, la multiplication de crédits, l’absence d’un suivi de santé….
Ainsi, des difficultés financières d’apparences insolubles ne laissent pas l’esprit tranquille, et rendrait de fait, moins intelligent que la moyenne, c’est du moins ce que prouve une étude scientifique.
Deux économistes et deux psychologues ont donc mené plusieurs expériences. Dans la première phase, 400 clients d’un centre commercial du New Jersey ont été interrogés. Leurs revenus étaient compris entre 20 000 et 70 000 dollars. Ils devaient imaginer leur réaction face à des problèmes de voiture, dont le montant de la réparation s’élèverait à X dollars. Est-ce qu’ils payeraient tout de suite? Contracteraient-ils un emprunt? Ou espéraient-ils simplement que le véhicule tienne encore le coup?
Vu que le temps porte conseil, les participants ont pu réfléchir un moment avant d’apporter leur réponse. Ce délai a d’ailleurs permis aux chercheurs d’évaluer leurs capacités cognitives. Résultat: lorsque le coût des réparations est peu élevé, tous les clients interrogés réalisent les mêmes scores aux exercices intellectuels. Par contre, lorsque la facture est plus salée, les petits revenus deviennent moins performants. Selon les auteurs de cette étude, ce dilemme les empêche de se concentrer sur d’autres tâches, tant ils sont accaparés par leurs difficultés pécuniaires.
Et dans les faits?
Dans cette deuxième expérience, les chercheurs se sont rendus en Inde, dans l’État du Tamil Nadu. Les paysans qui vivent de la canne à sucre connaissent la richesse par périodes, juste après la récolte. Ensuite, c’est la précarité qui reprend le dessus. Près de 500 d’entre eux ont donc été confrontés aux fameux tests cognitifs. Les résultats sont identiques à ceux observés aux Etats-Unis lors de la scène imaginaire, la pauvreté diminuerait leur Q.I de 13 points en moyenne. De quoi passer d ‘une intelligence normale à presque déficiente. En comparaison, une nuit blanche avec sono à fond, réduirait le Q.I de 9 points.
Cet état de stress constant des personnes démunies, à se demander comment survivre, affecteraient non seulement leur vie individuelle, mais également un autre pan de notre société.
En effet, le manque de disponibilité des capacités cognitives des pauvres, les empêcheraient de s’intéresser aux « affaires publiques », ce qui menacerait la démocratie. Car rappelons-le, la démocratie est la participation des citoyens aux affaires publiques. Autrement dit, quand on est pauvre, on a pas le temps de suivre la politique, de voter, de participer… Et en Tunisie, d’après le FTDES, on en aurait plus de 4 millions, et ce en 2022… Ça en expliquerait des choses.