Les images ont fait « le bonheur » des comptes Facebook des Tunisiens tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays. C’est une chose connue : on aime les scandales, on aime en parler, on se délecte de les montrer, surtout depuis l’avènement d’Internet et ses ramifications les réseaux sociaux.
Il est vrai que pour scandaleuses, les images de ces passagers sur un vol d’Istanbul de Tunisair, le sont. On voit des hommes et surtout des femmes habillées selon les grandes modes et coiffées comme dans un dîner gala, se disputer comme des chiffonniers, s’insulter et se battre comme des voyous. On entend les noms d’oiseaux voler si bas et l’on passe sans tarder au crêpage de chignon avec d’ailleurs une rare violence.
Ce n’est évidemment pas la première fois qu’un tel acte d’incivilité ou de violence se produit sur un vol de Tunisair. Même avant la révolution, il était fréquent que des passagers s’échauffent et s’injurient. Mais il y avait des limites à l’agressivité et la peur empêchait le passage à la violence. Aujourd’hui, il semble que liberté mal comprise, sentiment d’impunité et perte du sens civique ont rendu nos citoyens incontrôlables.
Une question mérite cependant d’être posée: quel intérêt a-t-il celui ou celle qui a filmé avec la froideur d’un cynique cette triste scène et surtout dans quel but l’a t-il mise en ligne? Monter qu’on aime assister aux scandales? On ne le sait que trop. Dire que ce genre de scènes n’arrive que chez nous? C’est faux. Il n’y a pas longtemps, la presse française rapportait des informations détaillées sur le regretté animateur Jean-Luc Delarue qui, ivre, fit pire en insultant hôtesses et pilote avant d’être débarqué. Ou encore l’acteur Gérard Depardieu, fortement alcoolisé, qui pissa dans l’avion.
Ce genre de scandales n’est pas l’apanage des Tunisiens. Ce qui l’est par contre, c’est ce désir débordant de montrer le scandale pour conclure à chaque fois que cela n’arrive pas que chez les autres, avant de jeter la faute sur l’Etat. On oublie cependant que filmer et diffuser ces scandales, c’est comme y participer, et que l’Etat c’est nous, citoyens tunisiens, tous et non pas une entité extérieure et étrangère.
Ceci étant, la violence est devenue une réalité quotidienne au sein de notre société. Elle prend toutes les formes et touche toutes les couches et les milieux. Nos sociologues ont du travail et cette déferlante de violence ne doit pas nous étonner quand on assiste à longueur de journée sur les antennes radiophoniques, les plateaux de télévision ou les réseaux sociaux à d’interminables et épiques combats où les insultes les plus grossières sont permises entre ceux censés donner l’exemple, c’est à dire nos politiciens.
En fait, on n’arrête pas de récolter dans la vie ce que ces leaders politiques ou d’opinion sèment sur le terrain. Sauf que maintenant, la violence est parvenue jusqu’à dans le ciel.
A.M.