L’organisation Forbidden Stories, ainsi que 17 rédactions, révèlent les dérives dans l’utilisation d’un logiciel espion de l’entreprise israélienne NSO Group, Pegasus, qui aurait été utilisé par des Etats pour cibler des hommes politiques, des journalistes, des avocats… Ce logiciel n’est commercialisé qu’auprès d’États ou d’agences gouvernementales, avec l’aval du gouvernement israélien. Forbidden Stories a eu accès à une liste de plus de 50.000 numéros de téléphone, entrés par une dizaine de clients de NSO dans le système qui active Pegasus. L’organisation a alors partagé cette liste, qui court sur plusieurs années après 2016, avec un consortium international constitué avec plusieurs médias. Pendant plusieurs mois, près de 80 journalistes ont analysé ces numéros de téléphone et identifié nombre de leurs propriétaires, dans une cinquantaine de pays. S’il apparaît que la France n’est pas cliente de NSO, plusieurs personnalités, dont des journalistes de l’Hexagone, figurent parmi les numéros sélectionnés. En tout, plus de 1.000 Français seraient concernés. Ces révélations montrent que la cybersurveillance est généralisée. Qu’il s’agisse du Mexique, de l’Inde, du Maroc, de l’Indonésie, de l’Arabie saoudite, des Émirats arabes unis, du Kazakhstan, de l’Azerbaïdjan, du Togo, du Rwanda, et même de la Hongrie, un membre de l’Union européenne, des agences gouvernementales ciblent leur propres concitoyens, ainsi que des personnalités à l’extérieur de leurs pays, qui n’ont pour seul tort que d’être des avocats, des journalistes, des diplomates, des médecins, des sportifs, des syndicalistes, de simples militants, ou des hommes politiques, y compris des ministres, et 13 chefs d’État ou de gouvernement (dont trois européens. Pegasus peut aspirer l’ensemble des données contenues dans un téléphone (photographies, messages échangés via des applications, carnet d’adresses…). Il peut être installé à distance sans que la cible s’en aperçoive.
C’est sans doute l’affaire de cyberespionnage la plus importante depuis l’affaire Snowden en 2013.
A propos de la France et en réponse à une question du consortium des 17 rédactions dont France info, le Maroc a répondu: « Les autorités marocaines ne comprennent pas le contexte de la saisine par le consortium international de journalistes (Forbidden Stories) sollicitant les réponses et précisions du gouvernement marocain sur les outils de surveillance numérique de NSO group. » Évoquant le cas d’Omar Radi, elle ajoute : « Les autorités marocaines demeurent depuis le 22 juin 2020 dans l’attente de preuves matérielles de la part d’Amnesty International qui a été incapable de prouver une quelconque relation entre le Maroc et NSO. » Pour sa part, NSO affirme: « NSO Group continuera d’enquêter sur toute allégation de mauvais usage(de Pegasus), et nous prendrons des décisions en fonction des résultats de ces enquêtes. Cela peut aller jusqu’à fermer l’accès de notre système à nos clients … Ce que nous avons déjà fait par le passé de nombreuses fois, et que nous n’hésiterons pas à refaire si nécessaire. »