-Rémy Julienne vient de nous quitter à l’âge de 90 ans emporté par le covid 19. Jean-Paul Belmondo son ami de longue date est accablé. Que ressentez-vous Nejib Ben Azouz à l’annonce de cette nouvelle, vous qu’on a toujours présenté comme le disciple de ce cascadeur casse-cou qui a révolutionné le monde du cinéma?
Je suis atterré, sidéré et terriblement perdu. C’est le cœur lourd et avec une infinie tristesse que j’ai appris sa mort dans la nuit du 21 janvier 2021. Vous savez, Rémy était beaucoup plus qu’un mentor, c’était un véritable ami, un confident même. C’était un père pour moi. Il nous a appris la persévérance et l’application de l’exécution d’une cascade pour finaliser sa réussite. Notre dernière rencontre remonte au début de l’année dernière, quelques semaines avant l’apparition du covid 19. On s’était retrouvé chez lui à Cepoy une petite ville où il a vu le jour et située à une centaine de kilomètres de Paris. On préparait alors une scène de cascade qui devait être revue avec des techniques nouvelles entre Avion-Voiture et moto à 14 mètres du sol. Puis l’épidémie est arrivée et à ce moment-là j’ai su au fond de moi et Rémy aussi d’ailleurs qu’on ne se reverrait plus. C’était déchirant.
-Comment s’est déroulée votre première rencontre ?
Notre première rencontre a eu lieu en 1987 au Festival de Cannes. J’habitais alors à Nice et j’étais de passage à Cannes. J’étais à moto, traversait la corniche en profitant du zéphire et puis je suis tombé nez à nez sur lui. On a commencé à discuter moto, cinéma. Il a probablement décelé en moi ce coté rebelle et m’a aussitôt demandé d’intégrer son équipe. Une équipe nombreuse composée de la fine fleur des cascadeurs du monde. « Je t’apprendrai tout ce qu’il y a à connaitre sur le métier de cascadeur et les cascades à moto » m’avais t-il alors annoncé. Le rêve. Depuis on ne s’est plus quitté.
-Quelle est selon vous la cascade la plus dangereuse que Rémy Julienne ait jamais exécuté ?
Alors sans aucune hésitation je dirais celle qu’il a faite pour le volet de la saga James Bond intitulé « Dangereusement votre». Pourtant, il en a faites des cascades Rémy, sur plus de 1400 films dont « Golden eye », « Il était une fois en Amérique » de Sergio Leone, « Les associés » de John Woo, « Mister dynamite » de Jackie Chan, « Da vinci code », « Taxi »… mais celle-ci était extrêmement risquée et Rémy s’en est sorti sans égratignure. Vous savez Rémy est un professionnel, un perfectionniste qui opte pour un risque mesuré, étudié. Et sur le plan humain, c’est un homme simple et généreux qui n’a jamais accordé de l’importance à l’argent et travaillait avec passion.
-Quelle est la cascade la plus périlleuse et plus dangereuse que vous ayez exécuté ?
Alors c’était pour la série italienne « La piovra ». Mais une autre cascade me tient particulièrement à cœur, celle pour « Ronin » de John Franheimer avec Robert De Niro et Jean Réno. Je suis par ailleurs consultant cascadeur pour les américains et j’ai monté ma propre équipe de cascadeurs qui comprend des français, des algériens et des tunisiens.
Propos recueillis par Waley Eddine Messaoudi