
Par Abdelhamid Zoghlami
Le terrorisme n’est pas fini. Il ne le sera probablement jamais.Il est sourd, aveugle, et il ne connaît qu’une seule langue, celle de la mort, de la désolation et de la destruction.
« C’est la bête immonde », aurait dit Bertold Brecht, en prenant bien soin d’ajouter que » le ventre d’où il a surgi est encore fécond ».
Et évidemment, ce ventre est celui de l’ignorance, de l’inculture, de l’extrémisme et de la haine. Ceci menant à cela, le nourrit et le renforce.
La Tunisie a connu les affres du terrorismes et en a payé le prix fort. L’effondrement du régime en janvier 2011 avait offert aux extrémistes de tous poils l’occasion de perpétrer des actres dont la barbarie surprit les Tunisiens autant qu’elle les indignia.
Pétris à travers leur longue histoire multi-millinaire des valeurs de l’ouverture, de la tolérance, et du vivre-ensemble, les Tunisiens ne pouvaient que rejeter avec force et vigueur ces pratiques d’un autre âge et qui leur étaient étrangeres.
Car il faut bien l’admettre, l’acte criminel de Djerba n’a pas d’autre objectif, et visait précisément ces valeurs dont sont imbus les Tunisiens.
Déjà, en 2002, la même synagogue de la Ghriba dans l' »Ile aux Lotophages » qu’est Djerba, pays » à la douceur de vivre mythique, évoquée par Homère dans son Odyssée, un acte terroriste tua 21 personnes. C’est donc là un remake dont le mobile et le caractère terroristes ne font le moindre doute.
On continue à viser la fête religieuse majeure de la minorité juive tunisienne, symbole de cette pluralité culturelle qui fait la spécificité de notre pays et de sa riche diversité.
Les extrémistes, c’est connu, ont horreur de la multiculturalité. La présence de l’autre dans sa particularité et sa différence, les dérange et les insupporte. Ils veulent une homogénéité ethnique et n’hésitent pas recourir à la violence et le meurtre pour la réaliser.
Bien entendu, les terroristes et les leurs commanditaires ne cherchent pas que l’élimination de l’autre, celui ayant une culture différente, des croyances et des traditions différentes. Ils veulent aussi frapper le pays dans ses intérêts vitaux. La saison touristique dont le pèlerinage de la Ghriba de Djerba a toujours constitué le coup d’envoi et le prélude, est l’autre cible du drame terroriste survenu mardi soir. Paralyser l’activité économique ou la freiner, c’est augmenter les chances de la détérioration de la situation sociale et favoriser l’instabilité et le chaos, toutes autant de conditions propices au surgissement de cette bête immonde qu’est le terrorisme.
Grâce à la vigilance de ses forces sécuritaires, qui du reste n’hésitent pas de payer de leur vie leur engagement pour la securite et la stabilité du pays, le rêve terroriste a été, cette fois-ci encore, neutralisé. Il faut l’achever. Comment?
En maintenant, d’abord, une vigilance sans faille et de tous les instant. C’est certes, le rôle de nos forces armées et de sécurité. Mais c’est aussi celui du citoyen appelé à prendre part à cette responsabilité dont il est le premier concerné.
Ensuite, en engageant un profond travail de culturation permettant aux jeunes générations notamment, une ouverture réelle sur les cultures des autres communautés formant la mémoire collective tunisienne. L’apport de la communauté juive à la personnalité culturelle tunisienne mérite d’être connu et apprécié. C’est un effort de pédagogie qui est demandé. L’école a là un important rôle à jouer.
Enfin, et tout en combattant toutes les formes de l’intolérance et de l’exclusion culturelle par toutes les voies légales, il reste évident que l’appui aux choix de la liberté et de la démocratie constitue le myen le plus sûr et le plus efficace pour prévenir toutes formes de fanatisme et de violence. Fermeté, liberté, démocratie doivent aller ensemble.
Tuer la bête immonde du terrorisme, c’est bien. Stériliser le ventre qui l’enfante, c’est encore mieux.