Il y a un an disparaissait Ali Chaouch, homme de mérite national et grand serviteur de l’Etat qui avait détenu plusieurs portefeuilles ministériels et occupé pendant cinq ans le poste de Secrétaire général du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD) de 2000 à 2005.
Distingué par une haute moralité et par une rigueur et honnêteté intellectuelle exemplaires, il avait gardé de ses origines paysannes de natif de Bouarada dans le Nord-Ouest, la passion pour la terre et les saisons, et l’amour des gens et des choses simples et vraies. Ayant fait ses études dans la filière franco-arabe et grandi dans la banlieue alors cossue de Hammam-lif, il en avait développé le sens du raffinement et une élégance dans le geste et le verbe qui ne lui feront jamais défaut. Direct mais avec finesse, franc sans être cassant, sûr mais non arrogant, Ali Chaouch était tout cela. C’était aussi une culture vaste et diversifiée, une connaissance profonde et détaillée de la géographie du pays, de sa topographie, de l’histoire de ses régions et de leurs populations, de leurs traditions et de leurs origines familiales et tribales. Une encyclopédie à lui tout seul.
Mais Ali Chaouch était aussi un francophone comme on en fait plus, qui pouvait-et aimait-déclamer les alexandrins d’une scène entière d’une pièce de Racine ou de Corneille ou te parler avec délectation de Rabelais, de Voltaire ou de Victor Hugo dont il aimait rappeler le jugement d’Anatole France qui trouvait qu’«il était, hélas, le plus grand poète de France ». Il finissait toujours en exprimant un long regret sur la dégradation de la qualité de l’éducation qui n’apprend plus rien aux jeunes.
Patriote engagé, Ali Chaouch était aussi un être engageant, d’une grande générosité et d’une attention mettant la situation de ses amis avant la sienne. Il savait écouter et trouver des excuses pour les autres. Il aimait parler mais pas un mot de trop ou de travers. Et quand la révolution le jeta dans la nasse juridico-politique qui se prolongea jusqu’à sa mort, il n’en conçut ni amertume ni rancœur. Tout juste la déception que les auto-promus révolutionnaires ne fussent pas aussi grands que la révolution qu’ils prétendaient servir.
Parti tôt, Ali Chaouch laisse le grand cercle de sa famille politique désemparé et sans la voix forte et prépondérante qui savait expliquer, synthétiser et convaincre. Il nous aurait démêlé cette troublante situation, séparé la graine de l’ivraie et nous aider à voir la lumière. Il aurait en tous cas empêché que les membres de sa famille politique ne s’éparpillent et aillent chacun de leur côté. Il aurait trouvé les mots justes pour réunir et faire renaître l’espoir.
Il était peut-être le dernier rassembleur.Qu’il repose en paix.