Ils roulent vite, ils dominent et gagnent. Trop beau pour être vrai et les soupçons reviennent sur le Tour. Au cours de la nuit de mercredi à jeudi, des gendarmes de l’Office central de lutte contre les attaques à l’environnement et à la santé publique (OCLAESP) ont perquisitionné les chambres des coureurs et le bus de Bahrain Victorious, en tête du classement par équipes. ils sont repartis avec des documents.
Une information avait été ouverte le 3 juillet par le parquet de Marseille sur » des chefs d’acquisition, transport, détention, importation d’une substance ou méthode interdite aux fins d’usage par un sportif sans justification médicale concernant des membres de Bahrain-Victorious » . « Il n’y a rien de spécial, nous avons eu une visite de la police, ils ont demandé les fichiers d’entraînement des coureurs, ont vérifié le bus et c’est tout. Ils ont dérangé les coureurs pendant une heure et à la fin, ils les ont remerciés », a expliqué le manager slovène de la formation Milan Erzen. Peut-être, mais le manager doit quand même savoir que c’est à cause lui que les suspicions de dopage planent sur cette formation du Golfe. Les performances de deux coureurs sur le Giro et le critérium du Dauphiné ont surpris. Et surtout, il est apparu en mai 2019 que ce manager serait impliqué dans l’affaire de dopage sanguin « Aderlass ». L’enquête est toujours en cours. Rien n’est prouvé car la centrifugeuse, équipement utilisé dans les transfusions sanguines pour séparer les globules rouges du plasma aurait pu servir non pas pour les coureurs, mais à doper des chevaux et chameaux à Bahreïn, l’entraînement de bêtes de courses étant l’une de ses multiples activités de Milan Erzen.
Le Slovène est à l’origine même de la création de l’équipe, propriété du prince Nasser bin Hamad Al Khalifa, dont il est proche depuis 2013. A l’époque, Erzen avait répondu que les accusations et suspicions lancées en plein Giro étaient « absolument fausses et infondées ». Mais deux autres membres slovènes de l’équipe , le coureur Kristjan Koren et le directeur sportif Borut Bozic, ont été suspendus pour leur implication, eux aussi, dans l’affaire Aderlass. Des soupçons pèsent aussi sur le maillot jaune Tadej Pogacar, encore vainqueur aujourd’hui à Luz Ardiden. Comment peut-il à bientôt 23 ans être aussi fort. Plusieurs journalistes et directeurs sportifs ont fait part de leurs doutes sans vouloir tirer de conclusions. Stéphane Heulot, ancien pro de bon niveau, déjà très surpris de la performance l’an dernier du Slovène du côté de la planche des Belles Filles où il a gagné le Tour, affirme dans Le Parisien que » « oui, il y a encore plein de gens malsains sur le Tour. Et il ne faut surtout pas avoir la mémoire courte. » À Ouest France, il confie que « dégoûté » il ne regarde plus le Tour où « on a vu des trucs qui n’étaient pas possibles, non plus, pour certains… » Et là aussi c’est le manager de l’équipe des Émirats qui est sur la sellette. En 1998, ce dernier, le Suisse Mauro Gianetti était resté dans le coma trois jours après avoir consommé, selon les médecins, du PFC (substance utilisée à titre expérimental dans les hôpitaux, proche de l’EPO). Il est ensuite devenu manager de la formation Saunier-Duval, exclue du Tour en 2008 après le contrôle positif de l’Italien Riccardo Ricco. Comme Erzen, Gianetti clame son innocence. Certains estiment que le Suisse a « inventé » Pogacar. Le 5 juillet, le maillot jaune avait répondu aux interrogations: « Nous avons beaucoup de contrôles anti-dopage pour faire taire les sceptiques. Par exemple, dimanche, j’ai subi trois contrôles en une journée : deux avant le départ, un à l’arrivée. C’est beaucoup, mais c’est important pour faire taire les critiques ». Suffisant?