« Nous avons suffisamment fait d’efforts pour sauver le journal. Mais là, on n’en peut plus. » La voix calme et résignée, un journaliste d’El Watan préférant témoigner à Middle East Eye sous couvert d’anonymat, ne cache pas son désarroi.
Voilà plus de quatre mois, qu’avec ses confrères et collègues de l’entreprise, ils ne sont plus payés. Mardi 12 juillet, ils ont décidé de mener une grève de deux jours pour interpeller la direction du plus grand quotidien francophone d’Algérie.
Après plus de vingt ans passés au sein de la rédaction, il se dit « déçu » et « surpris » par « le comportement des responsables » qui « n’ont même pas daigné nous remercier d’avoir travaillé sans être payés ».
Depuis le mois de février, la direction d’El Watan, dont le journal n’est plus tiré désormais qu’à 50 000 exemplaires contre 200 000 il y a une dizaine d’années, se dit dans l’incapacité de verser les salaires de ses 150 employés.
Selon le directeur de la publication, Mohamed Tahar Messaoudi, contacté par MEE, cette situation est liée au gel des comptes de l’entreprise par la banque principale, à savoir le Crédit populaire d’Algérie (CPA, étatique) et les services des impôts. Ces derniers réclament au journal le paiement des arriérés de la dette fiscale remontant à la période du covid, lorsque les autorités avaient autorisé les entreprises à différer le paiement de leurs impôts. Mais une fois la crise sanitaire passée, la société éditrice du journal francophone le plus influent d’Algérie a été sommée de s’acquitter d’un montant global de 32 millions de dinars (plus de 210 000 euros) « sans délai », insiste le directeur de la publication. Le remboursement de cette dette fiscale est venu se greffer à un autre problème : le tarissement des ressources publicitaires.