Alors que la Russie mène une guerre énergétique contre l’Ukraine à l’arrivée de l’hiver, concentrant ses bombardements sur les infrastructures stratégiques afin de plonger le pays dans le noir, Kiev s’organise.
Le président Volodymyr Zelensky a annoncé la mise en place de 4000 « points d’invincibilité » dans tout le pays. En parallèle des réparations sur les sites touchés, le gouvernement ouvre ces centres, ouverts gratuitement et 24 heures sur 24, qui permettent à la population de se réchauffer, alors que les températures sont déjà au-dessous de 0°C, de recharger son téléphone, d’avoir un accès à internet et à des pharmacies. D’autres ouvertures sont prévues dans les jours à venir.
L’objectif : éviter ce que les Russes attendent dans cette guerre énergétique, à savoir la fuite de la population. Mercredi, Moscou a tiré, selon Kiev, environ 70 missiles de croisière sur l’Ukraine, dont 51 ont été abattus. Ces frappes ont visé des infrastructures énergétiques clés, déjà endommagées par plusieurs vagues de bombardements de ce type.
Intervenant par visioconférence devant le Conseil de Sécurité de l’ONU, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a dénoncé mercredi un « crime contre l’humanité ». « Avec des températures en dessous de zéro, plusieurs millions de gens sans fourniture d’énergie, sans chauffage et sans eau, il s’agit évidemment d’un crime contre l’humanité », a fustigé M. Zelensky, durant une réunion d’urgence qu’il avait lui-même réclamée.
Kiev : pas la Russie…

L’armée russe a nié ce jeudi avoir mené la veille des frappes sur Kiev, affirmant que les dégâts dans la capitale ukrainienne avaient été causés par des missiles antiaériens « ukrainiens et étrangers ».
« Aucune frappe n’a été menée sur Kiev. Tous les dégâts dans la ville rapportés par le régime de Kiev sont les conséquences de la retombée de missiles étrangers et ukrainiens de défense antiaérienne, installés dans des zones résidentielles de la capitale ukrainienne », a indiqué le porte-parole du ministère russe de la Défense, Igor Konachenkov.
Il a indiqué que l’armée russe avait mené la veille « des frappes massives » contre « le système de commandement militaire ukrainien et les infrastructures énergétiques qui y sont liées ».
Si la guerre en Ukraine continue, l’infrastructure du pays de Volodymyr Zelensky « sera démolie et l’Ukraine sera envoyée au 18ème siècle », a lancé mercredi soir Piotr Tolstoï, le vice-président de la Douma, chambre basse de l’Assemblée fédérale de la fédération de Russie, invité par BFMTV.
Aide européenne

Le Parlement européen a soutenu ce jeudi la proposition d’une nouvelle aide financière européenne à l’Ukraine d’un montant de 18 milliards d’euros pour 2023 qui reste bloquée par la Hongrie, en conflit avec Bruxelles.
Par 507 voix (38 voix contre, 26 abstentions), les eurodéputés, réunis à Strasbourg, ont très largement donné leur aval à ce nouveau soutien financier à Kiev, pour faire face aux conséquences économiques de l’invasion de la Russie.
« Ce vote est important non seulement pour le financement indispensable que cela met à disposition du peuple d’Ukraine, mais c’est aussi important pour la démocratie », a salué la présidente conservatrice du Parlement européen, Roberta Metsola, après avoir annoncé dans l’hémicycle ce vote réalisé « à une vitesse record ».
Cette aide pour 2023, devant prendre la forme de prêts dont les intérêts seraient pris en charge par les Etats membres, a été proposée début novembre par la Commission européenne, escomptant un aval rapide du Parlement européen et du Conseil (Etats membres) pour un versement des premiers fonds en janvier.
Mais la Hongrie de Viktor Orban, en pleine négociations houleuses pour le déblocage de fonds européens en sa faveur, refuse pour l’heure de donner son feu vert à cette proposition de prêt commun. Elle a réaffirmé jeudi qu’elle préférait verser une contribution nationale à hauteur de 187 millions d’euros. Son veto empêche de facto une approbation au niveau du Conseil.
Poutine et le prix du gaz
Le président russe Vladimir Poutine a mis en garde ce jeudi contre de « graves conséquences » en cas de plafonnement du prix du pétrole russe, alors que les pays favorables à une telle mesure doivent bientôt annoncer leur décision.
« De telles actions vont à l’encontre des principes des relations commerciales et vont très probablement aboutir à de graves conséquences pour le marché énergétique mondial », a déclaré M. Poutine, lors d’un entretien téléphonique avec le Premier ministre irakien, Mohamed Chia al-Soudani, selon un communiqué du Kremlin.
La coalition des Etats souhaitant imposer un plafonnement du prix du pétrole russe, qui regroupe le G7, l’Union européenne et l’Australie, devrait annoncer la limite envisagée « dans les prochains jours », a déclaré mardi un responsable du Trésor, le ministère américain des Finances.
L’objectif est d’arriver à un prix maximal pour les hydrocarbures russes qui puisse être mis en place avant l’entrée en vigueur de nouvelles sanctions européennes, prévues à partir du 5 décembre.
Ce nouveau train de sanctions prévoit notamment d’interdire aux assureurs et réassureurs de couvrir le transport maritime de pétrole russe, les opérateurs européens devant être exemptés en cas d’accord si le pétrole est vendu à un prix inférieur ou égal au plafond préétabli.
Plafonner le prix du pétrole vendu par la Russie doit permettre de réduire ses ressources financières et ainsi sa capacité à poursuivre l’offensive en Ukraine, mais également de contenir la hausse des prix de l’énergie.
Bojo accuse
Dans un entretien sur CNN Portugal, l’ancien premier ministre britannique dénonce le «déni jusqu’au dernier moment» de la France face à la perspective d’une invasion russe.
Selon Boris Johnson, les nations occidentales étaient très divisées sur le sujet ukrainien avant que Moscou ne lance son attaque sur l’Ukraine le 24 février. «Cela a été un énorme choc, a-t-il dit, nous pouvions voir les groupes tactiques de bataillons russes s’amasser, mais certains pays avaient des appréciations très différentes». CNN rappelle qu’Emmanuel Macron était en pointe pour discuter avec Vladimir Poutine.
Deux autres grands pays de l’UE en prennent pour leur grade. L’Allemagne, d’abord, accusée d’avoir initialement privilégié une défaite militaire ukrainienne rapide à un long conflit. «Le point de vue allemand était que si cela devait se produire, ce serait un désastre. Il était donc préférable que tout cela se termine rapidement et que l’Ukraine plie» a affirmé Johnson, citant «toutes sortes de raisons économiques solides» pour cette approche. «Je ne pouvais soutenir cela, c’était une façon désastreuse de voir les choses, a-t-il poursuivi. Johnson charge aussi l’Italie, révélant que Mario Draghi, au pouvoir à l’époque, s’était dit «incapable de soutenir la position que nous prenions» étant donné sa dépendance «massive» aux hydrocarbures russes. Boris Johnson reconnaît toutefois qu’une fois les hostilités lancées, tous les pays européens se sont ralliés à la cause ukrainienne et lui apportent aujourd’hui un soutien indéfectible.