L’armée ukrainienne compte « renforcer » ses positions à Bakhmout, épicentre de combats avec les troupes russes dans l’est du pays, a indiqué ce lundi la présidence ukrainienne sur fond de spéculations sur un éventuel retrait des forces de Kiev de cette ville.
Les commandants en chef de forces armées ukrainiennes « se sont prononcés en faveur de la poursuite de l’opération défensive et d’un renforcement de nos positions à Bakhmout » lors d’une réunion lundi avec le chef de l’Etat Volodymyr Zelensky, a indiqué la présidence dans un communiqué.
La Russie cherche depuis l’été 2022 à conquérir Bakhmout, une ville de l’est de l’Ukraine qui comptait environ 70.000 habitants avant l’invasion russe lancée il y a un an. Les forces de Moscou et de Kiev y ont subi de lourdes pertes.
Les forces russes ont progressé ces derniers jours autour de la ville, qu’elles menacent d’encercler mais que les Ukrainiens continuent de défendre avec acharnement.
Dimanche, l’Institut pour l’étude de la guerre (ISW), un groupe d’experts américains, a estimé que les forces ukrainiennes étaient « vraisemblablement en train d’effectuer une retraite tactique d’ampleur limitée » à Bakhmout.
Alors que certains analystes s’interrogent sur l’intérêt pour les Ukrainiens de s’accrocher à cette ville aujourd’hui dévastée, l’ISW a estimé que la défense de Bakhmout restait « stratégiquement sensée », car elle « continue d’épuiser les effectifs et les équipements russes ».
« Il est improbable que les forces ukrainiennes se retirent d’un seul coup de Bakhmout, et il est possible qu’elles poursuivent une retraite progressive tout en combattant, afin d’épuiser les forces russes avec des combats urbains » où défenseurs sont « traditionnellement avantagés », selon l’ISW.
Auprès du journal « Kyiv Independant », des soldats désabusés indiquent qu’ils manquent de renforts et de munitions, que certains de leurs mortiers datent des années 1940 et qu’ils ont l’impression d’être dans le « même bateau » que leurs adversaires russes utilisés comme de la chair à canon.
Prigojine menace

Le patron du groupe paramilitaire russe Wagner, Evguéni Prigojine, dont les hommes sont en première ligne dans l’est de l’Ukraine, s’est de nouveau plaint d’un manque de munitions, attribuant les retards de livraison à une possible «trahison».
«Des ordres ont été donnés pour la livraison le 23 février. Mais à ce jour, la plupart des munitions n’ont pas été envoyées», a déclaré Prigojine dans un message publié dimanche soir sur les réseaux sociaux. Il a évoqué deux raisons possibles pour expliquer ce retard: «La bureaucratie ordinaire ou une trahison». Dans une autre vidéo publiée ce week-end, le responsable prévient. «Si Wagner se retire maintenant de Bakhmout, c’est le front tout entier qui s’effondrera». «Il s’effondrera jusqu’aux frontières de la Russie, peut-être même plus loin. De manière générale, la situation ne sera pas des plus agréables», a-t-il poursuivi.
La milice privée pourrait représenter un quart des combattants russes en Ukraine.
Choïgou à Marioupol
Le ministre russe de la Défense s’est rendu en zone occupée en Ukraine pour inspecter les travaux de reconstruction à Marioupol, ville dévastée par un siège destructeur mené par ses troupes au printemps, a indiqué ce lundi l’armée russe.

« Dans le cadre d’un déplacement dans la zone de l’opération militaire spéciale », M. Choïgou a mené des inspections sur les sites d’infrastructures déjà reconstruits ainsi que sur de nouveaux chantiers à Marioupol, dans le Donbass, a annoncé l’armée russe dans un communiqué qui ne précise pas la date exacte de cette visite.
Il y a notamment visité un centre médical, un autre de secours et un nouveau quartier résidentiel comprenant 12 immeubles, poursuit le communiqué, en ajoutant qu’il s’est également vu présenter un rapport sur la construction d’un important aqueduc censé relier la DNR à la région russe de Rostov.
L’armée russe est en charge des principales reconstructions dans les territoires ukrainiens annexés.
Marioupol, importante cité portuaire du sud-est de l’Ukraine, avait été ravagée au printemps 2022 lors d’un siège mené par l’armée russe face à des soldats ukrainiens notamment retranchés pendant plusieurs semaines dans la gigantesque aciérie Azovstal.
Kiev et l’UE
Le Premier ministre ukrainien Denys Chmygal a annoncé ce lundi la nomination d’un nouveau directeur à la tête du bureau national anti-corruption (NABU), affirmant que Kiev avait ainsi mis en œuvre les sept réformes réclamées par l’Union européenne en vue de négociations d’adhésion.

« L’Ukraine a maintenant rempli les sept recommandations de l’UE (…) Cela démontre notre détermination à passer au début des négociations d’adhésion dès cette année », a déclaré M. Chmygal dans un communiqué.
Le nouveau directeur du NABU est Semen Kryvonos, 40 ans, un juriste inconnu du grand public qui dirigeait jusqu’à présent une agence publique pour l’architecture et la planification urbaine.
Une influent militant anti-corruption ukrainien Vitaly Chabounine a déclaré sur Facebook que M. Kryvonos avait « zéro expérience » d’enquêtes contre la corruption et qu’il était lié à la présidence.
Bruxelles a accordé à Kiev le statut de candidat officiel à l’Union européenne en juin 2022, quatre mois après le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
L’UE avait toutefois accompagné le maintien de ce statut à au franchissement de sept étapes, parmi lesquels le renforcement de l’Etat de droit, la poursuite des réformes judiciaires, la lutte contre la corruption ou encore la mise en œuvre d’une « loi anti-oligarques ».
La prochaine étape du long et difficile chemin vers l’intégration dans l’Union est l’ouverture de négociations d’adhésion, une décision qui doit être prise par les Etats membres à l’unanimité après proposition de la Commission.
Les autorités ukrainiennes répètent vouloir entamer les négociations d’adhésion dès cette année, mais le processus risque de prendre des années.