Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a appelé, ce jeudi, Moscou à coopérer sur de possibles crimes de guerre. « Quand nous voyons ce site horrible, je vois combien il est important d’avoir une enquête complète et d’établir les responsabilités », a déclaré M. Guterres à Boutcha. « J’appelle la Russie à accepter de coopérer avec la Cour pénale internationale », a-t-il ajouté. Et l’ONU a documenté le « meurtre, y compris certains par exécution sommaire », de 50 civils, après une mission dans la ville le 9 avril. A Borodianka, autre commune proche de Kiev, M. Guterres a qualifié la guerre d’« absurdité au XXIe siècle », devant des habitations en ruines.
Une absurdité, mais pas pour Vladimir Poutine hanté, habité par la reconstruction d’une grande Russie et persuadé que le monde occidental veut mettre son pays à genoux. Signe qu’il entend dominer une Ukraine russe, l’usage du rouble pourrait être imposé, à partir du 1er mai à Kherson, ville proche de la mer Noire située sur la rive droite du Dniepr. Dans cette ville, les manifestations anti russes sont pratiquement quotidiennes.
Le président russe qui a mis en garde contre toute intervention extérieure a ordonné à ses forces de cibler l’aide militaire occidentale, ainsi que les ponts et voies ferrées en Ukraine servant à l’acheminer. Après un nouvel appel de la ministre des affaires étrangères britannique à livrer davantage d’armes lourdes et d’avions à Kiev, le Kremlin a estimé que les livraisons d’armes à l’Ukraine « menacent la sécurité » européenne. Ces armes, l’Ukraine pourrait les utiliser contre la Russie, a laissé entendre Mykhaïlo Podoliak, l’un des conseillers de la présidence ukrainienne. « La Russie attaque l’Ukraine et tue les civils. L’Ukraine se défendra par tous les moyens, y compris avec des frappes sur des entrepôts et des bases des assassins russes. Le monde reconnaît ce droit », a écrit sur son compte Twitter Mykhaïlo Podoliak.
Lors d’un entretien téléphonique avec Vladimir Poutine, Recep Tayyip Erdogan s’est dit « prêt à prendre l’initiative pour mettre fin à la guerre entre la Russie et l’Ukraine et à servir de médiateur sur la voie de la paix », a précisé la présidence turque dans un communiqué. M. Erdogan « a exprimé sa volonté d’établir une paix durable dans la région dès que possible en accentuant l’élan pris durant les pourparlers d’Istanbul », selon le communiqué.
Evacuation et mises en examen
La coordinatrice de l’ONU en Ukraine a annoncé, ce jeudi, qu’elle partait dans le sud du pays préparer une tentative d’évacuation de la ville de Marioupol, presque entièrement contrôlée par les forces russes. « Je vais à Zaporijia pour préparer l’évacuation espérée de Marioupol » port stratégique pilonné et assiégé par les Russes dans le sud-est de l’Ukraine, a annoncé Osnat Lubrani sur Twitter. Sur place, le commandant de la 36e brigade des marines a lancé un nouvel appel à l’aide, affirmant que se trouvaient avec lui, barricadés dans le complexe métallurgique d’Azovstal, 600 soldats blessés et des centaines de civils.
D’autre part, « Dix soldats de la 64e brigade de fusiliers motorisés russe, appartenant à la 35e armée russe, ont été mis en examen, en lien avec le traitement cruel de civils et d’autres violations de la loi et des coutumes de la guerre », écrit le procureur dans un communiqué accompagné des photos des militaires mis en cause.
Selon l’enquête, les militaires russes ont, pendant leur occupation de Boutcha en mars, « pris en otage des civils qui ne participaient pas aux hostilités et n’étaient pas armés. Les occupants ne leur ont donné ni à manger ni à boire », a détaillé le procureur. « Les suspects les ont fait se mettre à genoux, leur ont bandé les yeux avec du tissu et du papier autocollant, leur ont lié les mains avec des attaches plastiques, et ont menacé de les tuer en tirant délibérément dans leur direction », a-t-il poursuivi.

Gaz et pétrole
Depuis le 24 février, la Russie a encaissé environ 62 milliards d’euros avec ses exportations de pétrole, de gaz et de charbon. Une grande partie de ces revenus provient de l’Union européenne. Les échanges avec les Vingt-Sept ont représenté 44 milliards d’euros au cours des deux derniers mois, contre 140 milliards d’euros pour l’ensemble de l’année dernière (soit environ 12 milliards d’euros par mois), rapporte ce jeudi le Centre de recherche sur l’énergie et l’air pur dans son analyse des mouvements maritimes et des cargaisons.Joe Biden propose de transférer à Kiev tous les avoirs saisis « pour compenser le préjudice [causé à l’Ukraine] par l’agression russe ». Le soutien à l’Ukraine est coûteux mais les Etats-Unis ne peuvent pas « rester à l’écart », a affirmé le président américain depuis la Maison blanche. Il réclame une rallonge budgétaire de 33 milliards au congrès dont 20 en aide militaire. Mais les démocrates veulent y insérer un amendement pour augmenter du même coup le budget de la lutte anti-Covid aux États-Unis, ce que les républicains refusent catégoriquement.
