Les forces ukrainiennes ont reçu l’ordre de se retirer de la ville de Severodonetsk, dans l’est du pays, théâtre d’âpres combats avec l’armée russe, a annoncé vendredi le gouverneur régional. La conquête de Severodonetsk est une étape cruciale dans le plan de conquête russe du bassin industriel du Donbass, déjà en partie tenu par des séparatistes prorusses depuis 2014.
« Les forces armées ukrainiennes vont devoir se retirer de Severodonetsk. Ils en ont reçu l’ordre », a déclaré sur Telegram Serguiï Gaïdaï, le gouverneur de Lougansk, où se situe cette localité stratégique. « Cela ne fait plus aucun sens de rester sur des positions qui ont été constamment bombardées depuis des mois », a-t-il ajouté
La ville a été « presque réduite en ruines » par les bombardements continuels, selon lui. « Toutes les infrastructures essentielles ont été détruites. 90% de la ville est endommagée, 80% des maisons devront être détruites », a-t-il estimé.
Un représentant des séparatistes prorusses, Andreï Marotchko, a annoncé ce vendredi sur Telegram que tous les villages de la zone Hirske-Zolote étaient sous contrôle russe ou prorusse. Cette zone n’est qu’à quelques kilomètres au sud de Lyssytchansk, ville jumelle de Sievierodonetsk. Le gouverneur de Louhansk a fait des annonces similaires en déclarant que la ville de Mykolaïvka, à 25 kilomètres au sud-ouest de Lyssytchansk, était « perdue » et désormais aux mains de l’armée russe. « Les occupants tentent [également] de conquérir Hirske », a-t-il ajouté sur Telegram.
Signe des difficultés de l’Ukraine sur le théâtre des opérations, Pavlo Kyrylenko, le gouverneur de la région Donetsk, a affirmé à l’Agence France-Presse que plus « aucune ville » de la zone placée sous son administration n’était « sûre » pour ses habitants, les combats y étant trop violents.
Parallèlement aux assauts dans la région de Louhansk, les forces russes ont intensifié, depuis plusieurs jours, leur offensive sur Kharkiv (nord). Une équipe de l’Agence France-Presse (AFP) présente sur place a entendu de fortes explosions dans le centre-ville cette nuit, puis constaté dans la matinée que l’Institut polytechnique de Kharkiv, la plus grande et la plus ancienne université de l’est de l’Ukraine, avait été touché par plusieurs missiles. Toutes les vitres du bâtiment ont explosé et un immense gymnase en béton armé a été détruit. Son toit s’est partiellement effondré. Selon un militaire présent, il n’y a pas eu de victime.
Attentat à Kherson
Un fonctionnaire de l’administration d’occupation installée par la Russie à Kherson, dans le sud de l’Ukraine sous contrôle russe, a été tué ce vendredi dans un attentat, ont indiqué les autorités, alors que ce type d’attaques se multiplient. « C’était une attaque ciblée sur un collaborateur de l’administration civile et militaire, et qui l’a tué », a indiqué l’administration à l’agence russe Tass. Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a lui aussi dénoncé un « acte de terrorisme », sans plus de commentaire.
La victime, Dmitri Savloutchenko, était en charge des sports et de la jeunesse dans la région de Kherson. Il a été tué dans l’explosion de sa voiture.
Dans les tous premiers jours de son offensive contre l’Ukraine, la Russie a conquis et occupé une partie du sud ukrainien, notamment la région de Kherson, avant que l’armée russe ne soit stoppée. Ces dernières semaines, les forces ukrainiennes sont repassées à l’offensive dans la zone pour tenter de reprendre ces territoires perdus. Parallèlement, les attaques visant des responsables de l’occupation se sont multipliées.
Mercredi, le responsable pro-russe de la mairie de Tchornobaïvka a ainsi réchappé à l’explosion d’une bombe au passage de sa voiture.
Les autorités de l’occupation sont composées à la fois d’Ukrainiens soutenant Moscou, considérés donc comme des collaborateurs avec l’ennemi par Kiev, et des forces russes dans la région.
Les avions de Wagner
Le ministère de la défense britannique revient, dans son point quotidien, sur la capture, par les forces ukrainiennes, du pilote d’un avion de combat russe SU-25 Frogfoot abattu le 17 juin. Reprenant les déclarations ukrainiennes, il rapporte que le pilote a avoué être un ancien commandant de l’armée de l’air russe engagé par le groupe privé Wagner.
« Le recours à des personnels à la retraite travaillant désormais pour le Groupe Wagner pour effectuer des missions d’appui aérien rapproché montre que l’armée de l’air russe a probablement du mal à poursuivre l’invasion de l’Ukraine avec des équipages en nombre suffisant. Cette situation est probablement due à la fois à un nombre insuffisant de personnels formés et aux pertes subies par la Russie lors des combats », note le ministère britannique.
Ce dernier souligne également que le pilote russe capturé aurait utilisé des dispositifs GPS lors de ses missions, le pilote russe aurait utilisé des dispositifs GPS civils plutôt que des équipements de navigation militaires russes. Un élément que les Britanniques analysent comme le signe que les membres de Wagner pilotent d’anciens modèles de SU-25 et que l’armée de l’air russe ne leur fournit pas d’équipements modernes.
Plus de départs que d’arrivées
La tendance observée depuis plus d’un mois s’est inversée. Le nombre d’Ukrainiens qui arrivent en Pologne dépasse à nouveau celui de ceux qui retournent dans leur pays en guerre, ont fait savoir vendredi des gardes-frontières polonais. Jeudi 27 500 personnes sont arrivées d’Ukraine en Pologne tandis que 24 400 ont traversé la frontière dans l’autre sens. Mercredi, les gardes-frontières ont enregistré 26 300 entrées et 23 500 sorties, alors que lundi et mardi, les deux chiffres étaient pratiquement au même niveau, celui des entrées dépassant cependant légèrement celui des sorties. Cette tendance est confirmée par les gardes-frontières ukrainiens, qui signalent que 45 000 personnes ont quitté l’Ukraine par les frontières occidentales jeudi, dont plus de 25 000 par la frontière polonaise, contre 40 000 entrées, dont 37 000 citoyens ukrainiens.
Après le début de l’agression russe le 24 février, le nombre d’Ukrainiens arrivant en Pologne a explosé, avoisinant 140 000 certains jours, puis a graduellement baissé, jusqu’à tomber au niveau et au-dessous de celui des retours à partir du 10 mai, a précisé la porte-parole des gardes-frontières polonais, Anna Michalska.
Ce changement survient dans un contexte où les forces russes poursuivent les bombardements des grandes villes et où la destruction de certaines grandes entreprises, telles que la raffinerie de pétrole de Krementchouk, laisse des milliers de personnes sans travail.