Dimanche soir, sur tous les plateaux des télévisions françaises, le doute n’était pas permis : les représentants du Rassemblement national se voyaient déjà diriger le gouvernement, entraîner leur pays dans une autre direction tant l’échec cuisant du président empêchait à leurs yeux toute autre solution. Leur « plan Matignon » travaillé depuis des mois et destiné à amener Jordan Bardella à remplacer Gabriel Attal allait porter ses fruits.
Emmanuel Macron, qui avait revêtu un costume noir pour annoncer la dissolution de l’Assemblée nationale, ne l’entend évidemment pas de cette oreille. Désavoué par les Français, il tente le tout pour le tout en convoquant des législatives anticipées. Sachant que l’on ne vote pas forcément de la même manière pour des Européennes qui n’engagent pas directement le pays et pour des législatives qui déterminent l’avenir national, le président français espère un sursaut après le choc. Le vote « sérieux » après le vote de colère, le vote défouloir. Pour lui, deux hypothèses : soit le RN n’obtient pas assez de suffrages pour prétendre occuper Matignon, soit la France entre en cohabitation et les Français s’aperçoivent de l’incompétence de l’extrême droite et ferment la porte de l’Elysée à Marine Le Pen en 2027.
La presse française ne cache pas que Macron a mis son pays devant « un choix grave et historique » et ses titres sont éloquents : « À quitte ou double », « Coup de poker », « Coup de tonnerre », « Pari risqué », « Pari fou », « Pari extrême » ou encore « La dissolution rebat les cartes ». Et elles sont effectivement rebattues tant par la gauche qui cherche une nouvelle union avec ou sans les Insoumis que par les extrêmes droites qui pensent à un rapprochement. La droite est en quête d’une stratégie, les Républicains sont courtisés par les macronistes comme par le RN… Une sorte de chamboule tout.
Tous les opposants au tandem Le Pen-Bardella mettent en avant qu’il n’a pas de programme, de propositions réelles mais se contente de dire aux électeurs : Vous êtes heureux ? Non. Alors votez pour nous…Si en Allemagne, le chancelier Scholz a subi, lui aussi, une lourde défaite, si en Belgique, le Premier ministre de Croo, battu, a présenté sa démission, le visage du Parlement européen ne sera pas grandement modifié. Il faudra quand même suivre le positionnement de l’Italienne Meloni qui a pris une nouvelle stature et le jeu des alliances qui influenceront les votes sur l’agriculture, l’écologie ou la politique migratoire.