Par Abdelhamid Zoghlami*
On connaissait « le football samba » des Brésiliens, « le football Orange mécanique » des Hollandais, « le football cadenas » des Italiens, « le football magique » des Argentins, « le football ensoleillé des Espagnols »… On connaît désormais » le football foi » des Marocains.
Les Lions de l’Atlas n’ont peut-être pas de génies qui, comme l’argentin Messi, le français M’bappé, le brésilien Neymar, ou même le croate Modriç, tous capables de faire chacun, à n’importe quel moment, sur un dribble, une passe ou un tir, la différence et faire basculer la rencontre. Ils ont cependant un collectif, ils ont une solidarité, ils ont une âme. Ils ont la foi. Et c’est beaucoup plus important. Car si le génie fait la différence, la foi fait le miracle.
Les footballeurs marocains ne sont pas différents des autres footballeurs qu’on a vus au cours de ce Mondial qatarien. Ils ne viennent pas d’une autre planète et ne pratiquent pas un football différent de celui auquel on est habitué. Les joueurs constituant leur équipe nationale sont, d’ailleurs, majoritairement des enfants d’immigrés, formés dans des clubs européens, et y jouant. Ils ne sont donc pas-en principe-différents des autres joueurs maghrébins, ou même européens qui portent aujourd’hui les couleurs de leurs pays respectifs, qu’ils soient croates, portugais ou même français. Car le football a très tôt été, et restera, l’une des manifestations les plus évidentes de la mondialisation.
Mais plus que tous les autres, et mieux que tous les autres, les Marocains ont démontré qu’ils savent rester attachés à leur pays d’origine (90% des joueurs sont binationaux), non pas seulement par les liens sentimentaux et juridiques, mais en gardant et en revalorisant ses valeurs spirituelles et morales. Cette démonstration de piété dont font montre les joueurs sur le terrain, cette authentique humilité, cette bonté envers leurs pères et mères présents lors des rencontres, cette fidélité envers la cause palestinienne exprimée fermement mais sans ostentation…, c’est tout cela qui distingue l’équipe marocaine, en donnant à ses joueurs cette grande force intérieure, cette capacité à affronter des adversaires autrement mieux armés, plus aguerris et rompus à ce genre de compétitions internationales. Ils ont la foi.
On pourrait évidemment trouver ces valeurs un peu vieillottes, dépassées, voire ringardes. Erreur. Dans un monde livré aux lois du plus fort et où l’argent ne laisse désormais aucune place aux valeurs humaines morales et spirituelles, cette foi faisant agir comme un seul homme les joueurs Marocains, fait la différence. Elle leur assure cette résistance et cette combativité rarement vues auparavant. En fait, à football égal, ce sont ceux qui ont cette foi qui gagnent à fin. Et c’est là une leçon pour tous les africains et arabes. Pour tous les petits pays en somme
Bien sûr, cette foi ne vient pas de rien. Elle est le produit d’une éducation et d’une formation. Elle est basée sur des institutions solides, travaillant dans l’harmonie et le respect mutuel. Elle est la traduction d’une vision claire obéissant à une politique forte et cohérente. Elle, plus concrètement, le juste reflet d’une fédération nationale sérieuse et impliquée dans un projet national, d’un ministère des sports au-dessus des querelles personnelles ou claniques, et d’un championnat national ambitieux et de qualité. Bref, tout ce qui fait aujourd’hui défaut à notre football malgré le foisonnement des talents parmi une jeunesse hélas bouffée par l’oisiveté et le désœuvrement.
*co- fondateur de Tunisie-direct