Par Samir Meddeb
Suite aux critiques du Président Kais Saied envers le secteur du Tourisme, le 2 octobre, mettant notamment en cause « l’absence d’évolution dans ce secteur depuis les années 60 », le Docteur en géologie, Samir Meddeb, partage avec nous des données et une vision pertinente de l’état actuel de ce pan primordial de notre économie.
L’activité touristique dans laquelle s’est engagée la Tunisie depuis près de cinquante ans a été focalisée essentiellement sur le développement d’un tourisme balnéaire de masse. Nous disposons actuellement d’une capacité hôtelière d’environ 235 000 lits concentrés en très grandes parties et à plus de 90% sur les plages tunisiennes. Les modes de développement de cette activité en concordance avec la politique de l’aménagement du territoire ont privilégié l’octroi des meilleures zones littorales à l’activité touristique entrainant souvent et dans plusieurs régions littorales certaines formes de dégradation naturelle et de rupture des équilibres écologiques.
En même temps le produit touristique tunisien demeure de bon marché et constitue une source relativement limitée de recettes comparativement aux pays voisins de la méditerranée. Cette situation est due principalement au fait que le produit offert demeure peu élaboré et rarement intégrée dans son environnement naturel et socioéconomique et n’apporte souvent que très peu de valeurs ajoutées se limitant la plupart du temps à un hébergement en bord de mer.
Malgré les grands efforts d’investissement dans le secteur touristique, les recettes touristiques et plus particulièrement les bénéfices économiques demeurent en deçà des attentes. Ainsi et comparées aux recettes touristiques par visiteur des principaux concurrents méditerranéens, la Tunisie affiche les recettes les plus faibles. Le positionnement stratégique de la Tunisie dans le domaine, orienté presque exclusivement vers un balnéaire de masse, la qualité du service rendu, la faible intégration du produit touristique dans le contexte culturel du pays, la forte concurrence particulièrement dans la région méditerranéenne, sont autant d’éléments explicatifs de la faible performance du secteur.
La crise socioéconomique de la Tunisie de cette dernière décennie suivie par la problématique Covid a considérablement affaibli un secteur touristique déjà peu ancré dans le contexte socioéconomique et culturel du pays. Il se trouve aujourd’hui considérable amoindri.
Seule une révision profonde de la politique nationale en matière de tourisme basée sur la diversification et une meilleure valorisation du produit touristique pourrait dans l’avenir améliorer la contribution de cette activité au développement socioéconomique auquel aspire la Tunisie.
La durabilité du tourisme tunisien est tributaire de sa capacité à la diversification et la valorisation des produits touristiques ainsi qu’à l’offre correspondante.
L’enrichissement de ce produit par des apports culturels, historiques et naturels issus des réalités tunisiennes tout en étant parfaitement intégré dans des contextes plus élaborés faisant intervenir des professionnels de tout bord ferait gagner le produit en valeur et permettrait en même temps d’attirer une clientèle plus exigeante et disposée à pays des séjours à des prix meilleurs.