Au moment où tous les projecteurs sont focalisés sur la gestion d’une énième crise politique que traverse le pays et au moment l’activité gouvernementale est paralysée dans l’attente d’un hypothétique épilogue de la guerre ouverte qui opposé les 3 présidences, très peu d’intérêt est accordé au dossier économique.
Un dossier pourtant vital dont dépend la stabilité et la sécurité du pays et que, curieusement, le débat public occulte en raison des dissensions qui divisent la classe politique, la prépondérance du rôle que joue L’UGTT et de l’éclipse énigmatique de tout rôle de l’UTICA.
Dans cette période de fortes incertitudes, qui a condamné le pays à vivre sous perfusion et où la majorité des indicateurs ont viré au rouge, par la négligence et l’incompétence des uns et la propension hégémonique des autres, on a l’impression que les pouvoirs publics se complaisent dans le statu quo.
Pourtant aussi bien la Banque Centrale que les experts les plus avertis n’ont eu de cesse de rappeler à l’urgence d’une stabilité politique en tant que préalable pour restaurer la confiance, donner un bon signal aux bailleurs de fonds internationaux et aux investisseurs et remettre la machine économique en branle.
Ces appels auront-ils une chance d’être entendus ? Dans le climat délétère qui prévaut actuellement, la conduite du changement est plus que jamais improbable, idem pour la mise en œuvre de véritables réformes qui permettraient au pays de changer de cap. Cette fuite en avant est d’autant plus périlleuse que les moteurs de la croissance restent en panne, les finances publiques soumises à rude épreuve et la tension sociale ne cesse de s’amplifier.
La forte détérioration de la situation est loin d’être un fait du hasard, elle résulte d’une gestion calamiteuse des affaires du pays plus de dix ans durant. En témoignent une stagnation du PIB depuis dix ans à environ 40 Md$ ans en dollars courants, la baisse du PIB par habitant de 4 140 $ en 2010 à 3 295 $ en 2020, un de chômage endémique comme le montre le taux d’emploi estimé par les instances internationales à moins de 40 %.
Les autres indicateurs de cette spirale infernale se déclinent à travers une aggravation sans précédent de la dette publique qui a atteint 85 % du PIB contre 40 % en 2010. En effet, la persistance du déficit des comptes extérieurs autour de 10 % du PIB a entrainé un triplement de la dette extérieure de 31 milliards de dinars tunisiens en 2010 à 109 MdTND en 2020, soit plus de 100 % du PIB.
Last but not least, la croissance, négative attendue de 8,2 % ne va pas améliorer les choses contenant les germes d’une tension latente et de pression de plus en plus insoutenables
Homis la situation sanitaire difficile et inquiétante, ce qui interloque le plus c’est de voire désormais toutes les issues bloquées et les pistes de sortie de crise chimériques.
Avec un gouvernement en sursis et un risque d’une crise institutionnelle sans précédent, quel pilotage possible pour limiter les dégâts et sauver le pays d’un naufrage annoncé ? L’absence d’autorités capables d’assumer leurs responsabilités et de dire tout haut ce qu’on cherche à passer en catimini ou à diffuser à travers des canaux informels, pèse de son poids et ne fait que renforcer l’incertitude et le manque de visibilité.
L’absence de pouvoirs publics capables, dans cette période de fortes turbulences, de bien tenir les gouvernails, de dire la vérité aux tunisiens et de les mettre devant leurs responsabilités, fait cruellement défaut.
En effet, pour changer la donne et espérer que le pays ne tombe dans la banqueroute, il serait illusoire, cette fois-ci, de se contenter de simples expédients ou de mesurettes. Pour sortir le pays du bourbier dans lequel il s’est engouffré, il va falloir opter pour des politiques de rupture et opter résolument pour des mesures qu’on n’a fait que différer depuis 10 ans.
Dans le contexte actuel, le gouvernement se trouve devant un seul choix. Il doit assumer pleinement ses responsabilités en ne cédant à aucune pression et à aucun discours démagogique ou bien se démettre. Il n’y a plus d’autre alternative, d’autres choix à faire. Le pays a épuisé toute marge de manœuvre dans des combats politiciens improductifs et il ne lui reste plus à l’équipe au gouvernement que de s’épargner devant le précipice de faire un pas à l’avant.