Evguéni Prigojine, patron du groupe Wagner, s’était rebellé contre le commandement militaire et avait pris le contrôle de Rostov en Russie, le 23 juin dernier, avant de faire marche arrière. Sa mort a été annoncée mercredi 23 août, dans un crash d’avion.

C’est avec la guerre en Ukraine, que l’on a découvert le patron du groupe paramilitaire Wagner. Il s’est d’abord imposé en revendiquant en mai 2023, après des mois de durs et sanglants combats, la prise par Wagner de Bakhmout (est de l’Ukraine), célébrant une rare victoire sur le champ de bataille pour les forces russes.
Il sort alors du bois en admettant, pour la première fois, qu’il est bien le fondateur en 2014 du groupe paramilitaire Wagner, actif en Ukraine comme en Syrie, mais aussi en Afrique. Et s’impose comme un meneur. « Ces gars, des héros, ont défendu le peuple syrien, d’autres peuples de pays arabes, les démunis africains et latino-américains, ils sont devenus un pilier de notre patrie », revendique-t-il.
En octobre, il pousse cette logique de réclamer plus loin encore, d’installer en grande pompe dans un immeuble de verre de Saint-Pétersbourg (nord-ouest) le siège de la « compagnie militaire privée Wagner ». Maître de la provocation, il publie en février une vidéo le montrant à bord d’un avion de guerre où il propose au président ukrainien Volodymyr Zelensky de décider le sort de Bakhmout au cours d’un duel aérien.
Mais c’est aussi à l’occasion de cette bataille que les tensions avec le gouvernement russe, et notamment, le ministre de la défense Sergueï Choïgou, s’étaient accentuées: Prigojine l’accusait de priver Wagner de munitions et multipliait les vidéos dans lesquelles il insultait les commandants russes.
De plus, le milliardaire au crâne rasé avait accusé l’armée russe d’avoir bombardé des camps de son groupe Wagner toujours à la demande du ministre de la Défense, qu’il avait juré de « stopper » par la force.
Affirmant disposer de « 25.000 » combattants, le chef mercenaire de 62 ans avait appelé l’armée et la population russes à se joindre à lui, tout en se défendant de tout « coup d’Etat militaire ». En réaction, les puissants services de sécurité russes avaient ouvert une enquête contre lui pour « appel à la mutinerie armée », une grave accusation qui aurait pu en théorie l’envoyer derrière les barreaux pour longtemps. Mais mercredi 23 août, sa mort dans un crash d’avion, au Nord de Moscou, a été annoncée par la Russie.

Ascension et fortune
Pour se doter d’une armée à la hauteur de ses ambitions, M. Prigojine, natif comme M. Poutine de Saint-Pétersbourg, recrute des milliers de détenus pour combattre en Ukraine, en échange d’une amnistie. L’univers de la prison, Evguéni Prigojine le connaît bien, ayant lui-même passé neuf ans en détention à l’époque soviétique pour des délits de droit commun. Il sort en 1990, alors que l’URSS est en train de s’effondrer, et monte une affaire à succès de vente de hot-dogs.
Il monte ensuite en gamme, jusqu’à ouvrir un restaurant de luxe qui devient l’un des plus courus de Saint-Pétersbourg, où Vladimir Poutine connaît en parallèle sa propre ascension politique. Après l’accession en 2000 de Vladimir Poutine à la présidence, son groupe de restauration officie au Kremlin, ce qui lui vaut le surnom de « cuisinier de Poutine » et la réputation d’être devenu milliardaire grâce aux contrats publics.
C’est cet argent qu’il aurait donc utilisé pour fonder Wagner, armée privée d’abord composée de vétérans endurcis de l’armée et des services spéciaux russes. En 2018, alors que ce groupe, déjà remarqué en Ukraine, Syrie et Libye, est soupçonné de prendre pied en Afrique, trois journalistes russes enquêtant sur les affaires de la société paramilitaire sont tués en Centrafrique. Prigojine aura donc, roulé sa bosse jusqu’à, hier 23 août, avant de décéder dans le crash de son avion privé.