Parce que la victime n’est autre que le Président de la République, la gifle reçue hier par Emmanuel Macron, filmée et diffusée en direct sur les réseaux sociaux, retentit encore dans les quatre coins du monde.
Le Président de la république, qui plus est dans une vieille démocratie comme la France, n’est pas seulement la personnalité publique la plus en vue, le premier des citoyens , c’est encore et aussi une fonction et un symbole. Le gifler c’est offenser, outre l’homme lui-même dans son intégrité physique , la république toute entière.
C’est un soufflet sur le visage de l’institution républicaine. Ce triste fait nous interpelle en Tunisie, jeune démocratie et déjà atteinte de la gangrène de la violence. On a vu-on voit-violentés des policiers, des juges, des magistrats, des soignants, des enseignants. Ils ont tous un point commun: ils symbolisent tous l’autorité. Pourquoi on est-on arrivé là ?
Il y a sans doute plus d’une raison. Politique d’abord, avec la crise lente mais réelle des idéologies. Les partis n’ont plus d’autorité sur leur base-quand ils en ont déjà!-et cela a créé un réel vide qui a mis les gens dans un état de désorientation totale, voire de déperdition. On a l’impression de plus en plus que ces gens bougent et agissent sous des impulsions en dehors de tout cadre de réflexion.
Culturelle ensuite, l’on constate l’évident recul du rôle de la culture et de l’éducation, recul qui a eu pour effet immédiat une perte des repères et des sens des valeurs.
Communicationnelle enfin. Sous l’impact du développement phénoménal des réseaux sociaux on voit s’afficher des comportements individualistes donnant à voir une tendance à la violence et à l’irrespect, et des attitudes dénotant une intention délibérée d’apparaître et de s’affirmer par l’agressivité, quelquefois par l’agression, la défiance et le dénigrement d’autrui.
Il suffit de jeter un coup d’œil sur nos télés, qu’elles soient publiques ou privées , pour mesurer la perversion des mœurs politiques par laquelle l’invective a remplacé le débat et la menace l’argument. On ne se parle plus, on s’insulte. On ne débat plus, on s’injurie.Et tout cela au nom de la liberté d’expression!
On ne devrait plus être surpris qu’après ces élans outranciers nos politiciens soient conspués ou bousculés. A moins qu’ils choisissent de déserter le terrain au profit des plateaux des télévisions-ce qu’ils font du reste-nos politiciens auront finalement récolté ce qu’ils ont semé. La violence commence toujours par les mots.
Au fait, où en est-on avec le projet de la moralisation de la vie politique évoqué cent fois et cent fois oublié?
Mohcen Lasmar