Encore une fois la députée et présidente du Parti destourien libre(PDL), Abir Moussi s’emploie, en y entraînant les membres de son groupe, à perturber les travaux de l’Assemblée des représentants du peuple sous le prétexte que la plénière de ce mardi a inscrit subrepticement à l’ordre du jour de ses débats un point relatif à l’approbation de la loi sur l’accord concernant l’ouverture d’une représentation à Tunis du Fonds de Qatar pour le développement.Moussi dénonce ce projet d’accord comme étant un « bradage de la Tunisie à l’Etat de Qatar ».
Et comme à l’accoutumée la présidente du PDL monte occuper la tribune et le perchoir de l’Assemblée avec l’intention délibérée et affichée d’empêcher le déroulement des travaux. Et comme à l’accoutumée, elle diffuse à travers les réseaux sociaux par lesquels elle arrive à déjouer le black-out médiatique décidé à son encontre par le Syndicat national des journalistes, des vidéos pour fustiger, condamner et s’improviser porte-parole du peuple tunisien et son unique représentante.
S’il est de bonne guerre en politique de combattre ses rivaux par les moyens légaux et par l’usage de procédés respectant les usages, il est pour le moyen étrange et inacceptable d’utiliser les institutions nationales et d’en perturber la marche normale pour gagner quelques points de plus dans les sondages. Car quel pourrait être l’objectif final de Madame Moussi qui dispose par ailleurs de tous les moyens légitimes pour critiquer les projets de loi et s’y opposer en s’appuyant sur les droits que lui offre la Constitution et le règlement intérieur du Parlement? Et justement, le parlement étant fait pour parlementer, il est peut-être temps que la présidente du PDL arrête de recourir aux méthodes de l’agit-prop, d’épargner ses collègues parlementaires et tous ses concitoyens de ses sit-in systématiques et ses démonstrations de force et autres actions de protestation dont le résultat final est l’atteinte de l’intérêt général dans un moment aussi délicat et crucial que celui que traverse le pays.
Il est vrai qu’il y a un grand sentiment de colère et de frustration qui traverse le pays. Cherté de la vie, appauvrissement, chômage et, pour ne rien arranger, une pandémie aux effets dévastateurs inattendus. Il est vrai aussi qu’il y a eu des erreurs politiques tant sur le plan des choix que sur celui des méthodes. Les partis politiques responsables et à l’ambition nationale devraient se garder cependant d’en profiter en usant de la démagogie populiste qui ne mène jamais très loin. On peut sans doute réussir provisoirement , en caressant une population endolorie et inquiète dans le sens du poil et en lui désignant les adversaires politiques comme seuls responsables et coupables. Mais après, quelles réponses réelles et efficaces, quelles solutions immédiates, et quels outils politiques utiliser pour changer la réalité?
Abir Moussi s’inscrit sciemment en faux contre toute la politique en place et contre toutes les formations politiques. Elle déclare son hostilité au processus démocratique rendu possible par la Révolution de 2011 qu’elle récuse franchement.
Ce faisant, celle qui se prétend dépositaire de l’héritage destourien oublie certaines vérités essentielles parmi lesquelles la propension naturelle au dialogue et la disposition au débat qui a toujours caractérisé les destouriens, leur sens du réalisme du pragmatisme et leur refus de l’exclusion et du rejet de l’adversaire. Elle oublie surtout qu’elle agit dans le système-même qu’elle cherche à faire tomber, celui de la pratique démocratique.
Abir Moussi n’a pas le droit de leurrer les destouriens en leur faisant dénier la réalité de la Révolution de 2011 et faire comme si rien ne s’était passé et que la roue de l’histoire n’avait pas tourné. C’est plus qu’une erreur, c’est une faute.
Enfin, il temps que madame Moussi descende du perchoir qu’elle occupe indûment pour nous présenter son programme politique.
Mohsen Lasmar