Le Président algérien, Abdelmajib Tebboune, actuellement en visite en Italie, a déclaré ce jeudi 26 mai qu’un accord avait été conclu avec son homologue Sergio Mattarella pour « sortir la Tunisie de l’impasse afin qu’elle revienne sur la voie de la démocratie ».
Une « sortie » qui surprend de la part de celui qui apparaissait jusqu’à présent comme l’allié du Président Saied, notamment depuis le 25 juillet. Cela pèsera-t-il pour autant sur la ligne présidentielle?
Au vu des derniers événements en Tunisie, on peut dès à présent en douter…
En effet, depuis le décret n°30 qui porte sur la création de l’Instance consultative pour une nouvelle République (paru vendredi 20 mai au Journal officiel), et donc une nouvelle constitution, rien ne va plus dans le pays. Une fronde générale s’est installée, l’UGTT rejeté catégoriquement ce dialogue, les partis politiques -exclus en amont- ne cessent par communiqués et conférences de presse de dénoncer ce passage en force présidentiel, les universitaires par le biais d’une pétition se sont eux aussi opposés et appellent à la neutralité de leurs doyens, et certains syndicats, organisation nationales se divisent comme l’UTAP et la LTDH.
Pour autant Kais Saied ne semble pas ciller, hier plusieurs décrets relatifs à ces changements sont passés, notamment celui investissant les doyens comme consultants juridiques et économiques et Bouderela, bâtonnier des avocats et désormais Président de la Commission consultative des affaires économiques et sociales, a été accueilli par le chef de l’Etat à Carthage. Pas de changements donc.
Rien de surprenant de la part du Président de la république au final. Depuis les mesures exceptionnelles du 25 juillet, la presse, dont l’un de ses rôles est d’être vecteur de dialogue entre les dirigeants et le peuple, n’a plus sa place au Palais. Un signe clair et net que dialogue et communication ne font pas partie des paramètres présidentiels.
Néanmoins c’est le silence observé par peuple tunisien qui interroge. À part les inconditionnels soutiens aux partis politiques qui ont manifesté ces dernières semaines et qui se comptent en quelques milliers, les Tunisiens semblent muets et comme ayant abandonné la vie politique. Si les sondages affirment un soutien populaire indéfectible à Kais Saied, la Consultation nationale et son faible taux de participation (6%) indique cependant un abandon de la part de nos concitoyens qui ne sert que trop bien le dessein politique du Chef de l’Etat.
Kais Saied continuera donc probablement à faire la sourde oreille, pour arriver à ses fins, cependant il doit garder en mémoire que l’Histoire a prouvé qu’en Tunisie, c’est la situation économique et sociale qui a le dernier mot. L’inflation, la baisse du pouvoir d’achat, les pénuries, le chômage…ont mené à bien des révoltes populaires qui ont toujours eu raison des dirigeants. Aujourd’hui si la colère ne parle pas encore elle grogne tout de même.